Il ne s'agit pas de ne pas vouloir regarder en face ou même de façon biaisée. Au contraire.
Au contraire quand je souhaite voir au fond et voir à l'intérieur de moi cette sorte de sous-courant d'images - curiosité à l'égard de ce qu'on appelait au début du siècle précédent un peu mièvrement des "états ou des courants de conscience" et qui est en fait, mais plutôt au-dessous, en profondeur, un torrent, un magma, un pré-volcan menaçant ( quand nous résoudrons-nous à aller y voir de plus près au lieu de le défausser, de l'ostraciser, de le traiter comme cet asile où on enferme les fous) - je ferme fort les yeux et alors apparaissent des sous-jacentes images.
Il s'agit de clore ses paupières pour voir apparaître aussitôt des images et en ce moment, par ces temps de ciel obscurci, de lumière chiche, de vent, d'ondées répétées, d'autant mieux, ça s'écoule et n'en a jamais fini.
Quand je ferme les yeux, je vois :
des lieux, des visages, des formes mouvantes dans le vent, défilant comme chevaux au galop, et parfois, ce défilé, ce cinéma intérieur que je projette involontairement me présente aussi des tableaux, des sculptures, des architectures qui en général n'existent pas mais semble-t-il, emprunteraient beaucoup au réel que j'ai vu et viennent se rapprocher de moi, m'effleurer.
Là je vois ces monuments ou du moins qui leur ressemblent, des monuments, des villes entières, lisses, blanches, construites par ces architectes utopistes, peu nombreux en définitive, qui sont si belles, géométriques, épurées, qu'elles semblent construites non pour être habitées mais pour évacuer (les imperfections de) l'humain.
Il faudrait avoir la force contraire de leur opposer à volonté, en redirection, courant contraire, lutte possible, ces foules, ces marchés, ces bistrots, ces rues surpeuplées, ces cortèges parfois grotesques et si vivants, ces danseurs, ces saltimbanques des peintres pré et post impressionnistes, ces tourbillons de couleurs des tachistes et nabis, ces expressionnistes, ces fous de mouvements qui déplacent les lignes au point où toute géométrie se brouille et toute perspective se ruine en aplats crevant la toile.
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