jeudi 29 septembre 2022

Formater.

 Ce terme emprunté à l'informatique renvoie et s'applique aujourd'hui à toutes sortes de structures à complexité variable, vivante ou non. On peut formater ou reformater un disque dur, un programme, un système de fichier, ou aussi l'individu, la conscience, l'information et ses supports, toutes sortes de données et de documents, de mémoires, de stockages, de fonctionnements et semble-t-il de comportements. Autant dire que ce terme suggère l'idée qu'on pourrait effacer et reprogrammer ou préparer à une suite d'opérations non "naturelles" ou envisagées comme incompatibles, voire nocives, autodestructrices et inhumaines, nos schémas et systèmes de fonctionnement mentaux, liés aux habitudes, aux croyances, aux opinions, aux choix, aux critères de choix, aux langages et aux termes que nous utilisons, ou même et par voie de conséquence, à ce qui pouvait nous apparaître comme des certitudes ou des piliers de notre action et de notre vie, de notre histoire, de notre être . . . 

Oui, direz-vous l'être profond ou pas c'est quoi ? 

Alors qu'en est-il au juste ?

Faut-il (est-il permis de),

en toute quiétude, nous confondre avec une machine électronique ou avec un chien de Pavlov ?

Allons-nous en définitive être cernés et pénétrés de toutes part . . . au travers de ces effacements, de ces remises à zéro, par l'I.A., l'intelligence artificielle que nous avons nous-même inventée et mise en place comme un simple prolongement incroyablement rapide, certes, de nos "facultés", de notre puissance cognitive et décisionnaire ?

Ce ne serait pas seulement l'affaire des robots supérieurs qui prennent ou prendraient notre place, de robots révoltés qui en SF élémentaire prennent le pouvoir, ce ne serait pas seulement, par une opération inclusive de pénétration, une greffe du non vivant sur le vivant. Ce serait à proprement parler une abolition par effacement de nos "données" natives ou si difficilement, par réflexion, choix crucial, souffrance et application, acquises. 

L'abus qu'on fait aujourd'hui de ce terme introduit dans notre discours, dans notre appréhension du monde, un non-sens. L'image qu'il véhicule par analogie grinçante, devient une menace et plus encore une démission, une sorte de volonté contrainte d'abdication.

Articles en Souffrance à ce jour 29/09/2022.

Formaté.

Père (invasif).

Logique.

Accident;

Socrate;

Vedel. Védelin. Vacquerole.

Défi.

Diana.

Collier de branchement Bayard.

Atypique.

Convivial.

Superfétatoire.

Huaca.


lundi 12 septembre 2022

Tombeau pharaonique. (Tableau 1).

 C'est un bien grand mot pour un logis péri-urbain entouré de végétaux presque tous natifs du lieu : une petite colline garigueuse qui a dû être au fil du temps, olivette avec double capitelle montée pierre à pierre en coupoles aujourd'hui partiellement effondrées (on y amassait toutes sortes de récoltes frugales et quelques paniers, jarres et outils), terrain de rassemblement de moutons avant la tonte ou la transhumance, puis lieu de chasse (lièvre, perdrix, sanglier, renard et même écureuil pour ne pas rentrer bredouille et tirer quelques cartouches),  plus tard encore et toujours terrain de chasse et villégiature masetière, logis festif, dominical, des artisans commerçants amateurs de simplicité agreste et de confort rustique et depuis le siècle précédent, devenu zone de "villas provençales" conventionnellement imitées d'un style purement imaginaire mais bien dans le goût classes un peu enrichies et montantes du XXème pour ceux qui voulaient pratiquer (début d'un sport élitiste) la ville à la campagne ou l'inverse et qui parfois y ont maintenu cyprès, oliviers (parfois replantés et importés d'Espagne en gros calibre et taillés en caniche), amandiers, arbousiers, figuiers, néfliers aussi car c'est pas pour rien, au moins pour le beau feuillage qu'on en replante, et y ont souvent creusé des piscines de bomme longueur pour supporter la chaleur infernale du lieu venté certes mais surtout en hiver.

Pour nous qui avions changé de pays plusieurs fois, de maison tant de fois, emporté, même quand nous allions dans des pays où on ne trouvait presque  rien et où nous avions le droit ou le privilège de déménager en container une part de nos affaires, une lourde et unique valise dans un premier temps, puis le minimum d'objets, de livres (100 pour moi, limite autoaccordée arbitrairement), parfois aucun meuble c'était tant mieux, juste des vêtements et encore, le climat exigeait parfois un changement complet de garde-robe, ce fut un havre de confort, de rétablissement et de sécurité, après, surprises, traumatismes, fluctuations imprévisibles, adaptations, sensation constante d'instabilité, et nous y avons réuni photos et souvenirs de famille, meubles rescapés et entreposés ou hérités de proches ancêtres, livres, tant de livres, encyclopédies, dictionnaires anciens dont le premier Littré d'origine (merci Pierre) qu'on peut consulter sur le Net mais dont j'adore relire la préface émouvante  écrite à plus de 70 ans par l'infatigable Emile, tableaux, mais aussi . . . gravures, glanés, achetés en direct, collectionnés, sculptures même, fragments d'antiquités ou de créations contemporaines de notre passage, dédicacés et reçus en cadeaux souvent, bref irremplaçables. Autant dire bouts matériels, témoins de notre vie antérieure ayant nourri notre présent, incrustés de souvenirs ineffaçables, injectés dans notre métabolisme, comme quand nous disons encore entre nous malicieusement et machinalement : " toldo" au lieu de store, "cumbuca" au lieu de coupelle ou "si Deus quiser" quand nous n'avons aucune certitude sur nos jours avenirs en ces temps troubles et en nos âges canoniques.

(A suivre)