lundi 27 janvier 2020

croûte

une croûte en peinture saute parfois aux yeux
ne les ménage pas, ou au contraire passerait inaperçue,
gribouillis, ramassis de bonne volonté et de confusion suave,
mais parfois tout au contraire, ces maladresses méchamment doucereuses,
ces ratures du trait, ce sont elles qui relèvent du bien joué, du bien tranchant et découpé , de la vision qui hante et tranche,
mais en écriture alors que serait une croûte ratée avec l'aplomb du talent neuf ?

samedi 25 janvier 2020

beignet

quel drôle de rapport au beignet écrit beigné
fascination / répulsion mais pas seulement, oui sans doute alors le plaisir du gras, la fondante candeur dont on parsème en poudre certains beignets dits oreillettes ou bugnes
crissant sous la dent
reçus comme une beigne douce en bain, faudrait-il alors un A ?
sucre ou sel
on met ce qu'on veut dans un beignet, presque tout
c'est comme écrire, ça crisse, comme en croquant sans faim des beignets
ça tache les tissus et graisse les doigts
beignets, petite beigne qu'il m'est arrivé d'écrire beignés
comme on écrirait baignés de lumière ou d'huile
(trempés dans l')
mais pourquoi ?
était-ce dans ce rêve - oui c'était -  que vous pourrez lire si vous allez à Angoulême,
au stand Marsam
et qui, illustré par un dessin de Céline Guichard - merci à sa plume onirique - et mis en page et en typographie sur papier, imprimé
par celui que j'appelle Saint A F parce qu'il m'a été très secourable,
Alain François,
il l'a même astucieusement cousu de fils rouges qui dépassent, sortant du cadre, courts et embrouillés autour de cet opuscule minuscule,
mais pourquoi cette orthographe fautive respectée par lui, mon saint patron ?
oui beigné sans ce T final qui veut dire petite beigne ou bugne par opposition à certaines très grandes beignes ou bugnes plus grandes que des crêpes
je crois savoir, sans me prendre pour autant pour Derrida,
simple coquille ajoutée par moi, bien involontaire, aveuglement de relecture,
mais vous il vous faudra aller le lire,
ce récit, ce rêve
qui a pour nom, sorte de mémoire d'aveugle sensible aux odeurs,
le chien psychopompe.

vendredi 17 janvier 2020

Diagonale.

Que j'aime.
Certes il ne faudrait pas en abuser, parfois il faut lire mot à mot, verset par verset, le poème travaillé au souffle, au rythme, au sillon dans la terre, au cordeau. Même la simple phrase claire, un peu étirée au détour des aboutissants, doit être parcourue en son cours. Épeler les articulations et les circonstances, ne rien omettre, écouter la musique aussi, la respiration, entendre les coups qui ont forgé le galbe du discours, son creux, sa logique, ses recours au verbe révélateur, brûlant ou sourd et atténué.
Pourtant, est-ce un défaut, un fâcheux penchant, je suis impatient.
Je n’omets pas, je cours.
Bref, je parcours beaucoup de longueurs en diagonale. tellement de discours sont parfois allongés à croire qu'ils relèvent de l'hésitation pure, du non dire du vide ou du paiement au mètre.
Les vues en diagonale ont aussi ma préférence.
Couper en travers pour rejoindre, au bout encore, la ligne de fuite du monde changeant.
Même, et c'est plus grave, ça pourrait me conduire à me tromper, ces omissions et raccourcis, quand le discours et la pensée sont fermes et tendus, j'aime aller vite à ce qui me semble essentiel, la clé.
Voir dans la personne et ses œuvres, la figure résumée ou plutôt, ramenée au trait concis.

mardi 7 janvier 2020

F de fuite.

N'ayant jamais eu l'impression de fuir, c'est dur à  avaler.
Ayant aimé parcourir, explorer, changer, mais ayant assez peu moi-même changé, ayant toujours fait front (certains ont pu aller jusqu'à me comparer à un cerf faisant face aux chasseurs, encerclé dans les positions où il m'est arrivé de me placer, non par bravade mais par souci de tenir la ligne face à des contradicteurs, voire des ennemis bien décidés à s'offrir un trophée de mes bois et de ma peau pour s'en refaire, ces lâches, ces pâles pleutres, des statures de faux personnages composés de dépouilles et d'emprunts ), le fait de sans arrêt changer de place ne m'a jamais donné l'impression de fuir.
Pourtant aujourd'hui, le fait de rester en place, de m'y tenir fixé, d'y être arrimé, engagé dans toutes sortes de tâches, fait apparaître à mes propres yeux, le reste de ma vie comme une fuite.
Fuite devant me mener là peut-être ou aussi bien ailleurs ?  Confrontée à ces repères de hasard devenus pour l'occasion amers, ancrage, amarrage.
La question demeure : Vais-je arriver a trouver mon lieu, ici ou ailleurs ?
J'envisagerais bien de reprendre mes frusques, mes outils, mes scies et haches, tous ces marteaux et pinces, tous ces livres, amoncellements réduits de signes, ces dessins à la plume, ces peintures naïves, ces vielles revues, ces cartes, ces articles découpés et ces notes en carnets multicolores, ailleurs où j'aurai encore trop d'espace et de territoire pour me sentir étouffer à l'étroit, acculé volontaire et à mon aise.