lundi 31 juillet 2023

H de H, comment au fond de cette histoire, communiquant avec elle, se tient une autre histoire.

 Déjà évoquée, l'histoire de Dio, si je n'arrive à vous raconter son imbrication à la mienne et son développement propre, ne vous dira rien. Histoire parmi les histoires elle pourra très bien, sans relief aucun malgré ses péripéties particulières, passer inaperçue dans la masse des histoires toutes singulières, passer à la trappe en fin de compte, pertes et profits du dire, de l'écrire, du conter, du raconter.

Or, il ne faut pas.

Il ne faut pas que cette histoire se perde, se dilue, s'infiltre dans le rien des mots désarticulés, dans le désert blanc des lettres et des signes évaporés.

Il ne faut pas car elle traverse la jointure des siècles, le pli, le retournement, le basculement de position qui affecte la transition du siècle XXe au siècle XXIe, cet apparemment anodin, purement conventionnel et arbitrairement numérique, changement de millénaire et donc cette douloureuse surprise, cette souffrance, ces désillusions, ces incompréhensions, cette peur de l'avenir qui a surgi tout à coup et nous fait actuellement si mal, même si nous feignons de continuer faussement imperturbables, dans la ligne de notre trajectoire, nous plaçant dans l'inconfort des grandes incertitudes et des piétinements dans les sables mouvants.

Or bien sûr je ne détiens, dans ce brouillard que nous respirons, dans ces montées de chaleur et de froid, dans ce désordre des idées qui s'empare de l'univers, aucun secret décisif, aucune clé, aucune loi universelle et rassurante.

Et Dio, DIO Darko Brac, je crois, pas plus que moi. 

Ce qui m'importe se résume à très peu : un témoignage du changement, du basculement, de ce vide qui peu à peu s'est creusé sous nos pieds.

Dans cette pente abrupte et faite de rochers droits où il nous faut monter ce n'est même pas une piste d'ascension rendue confortable par le ferraillage, c'est tout juste le récit  d'une traversée inédite (pas inouïe) , une traversée par des points que seul un hasard aveugle et heureux a rendus praticables.

Qui est (était ? nuançons : . . . ) a sans doute été - en partie au moins - Dio Darko Brac ?

La première chose à savoir c'est qu'il faudrait ajouter un accent sur le C final de Brac de façon à le prononcer Bratch . . . . mais je n'ai pas ça actuellement, cet appendice, sur mon clavier.

La deuxième c'est que Brac étant un enfant trouvé, comme on dit, et je vous promets que nous verrons exactement où, ce nom est celui de sa mère adoptive, une femme peu ordinaire, une partisane de la première heure de Josip Broz dit Tito aux premiers temps de la résistance yougoslave, une des premières actives et terriblement efficaces en Europe contre le nazisme. 

La troisième, c'est l'histoire du premier prénom de Brac.

Un prénom rare et qui ne fut pas donné au hasard. Nous verrons cela dans un autre fragment si remonte à la surface de ma mémoire bouillonnante, mais parfois déficiente et parcellaire, le détail réel ou en partie légendaire de cette attribution.

dimanche 30 juillet 2023

L de Languedoc (pittoresque).

 Outre les fêtes votives du Gard avec jeux bovidés aux longues cornes africaines et mithratiques et les joutes nautiques de l'Hérault, réminiscence du temps des croisades, avez-vous vu aussi les pyramides humaines des Catalans ? le Languedoc-Roussillon actuel regorge de pittoresque : à la Grande Motte il st interdit de se promener torse nu, à Collioure on a peur des requins, à Canet il est interdit de manger des glaces sur le bord de mer (arrêté municipal) à la suite des attaques violentes des goélands, des sales bêtes, à Nîmes la Fontaine et les piscines infernales vont dans quelques heures, au chant des cigales, bouillir, dézinguant naturellement les moustiques.

samedi 29 juillet 2023

M de (un) mystère (de plus).

 Pourquoi, Bon Dieu pourquoi ? pourquoi chaque matin ou presque quand encore un peu endormi, vers six ou sept heures, je prépare le petit déj, thé ou café alternés, tartines grillées, beurre, confiture, pot de lait, sucre en poudre, oranges, tasses choisies selon l'humeur, couverts idem, serviettes de tissu remontant au moins à une génération, nous avons tellement de "linge de maison" ! choix de l'emplacement, sur la terrasse au soleil naissant ou dedans en fonction du temps, du vent, de la qualité de la nuit passée, pendant que je mets en route la théière ou la cafetière, électriques toutes deux, m'assaillent des images de la petite maison de vacances de mes parents, synonyme d'un inconfort heureux, ou d'une mission au Pérou où accompagné d'un collègue ami, nous devisions, attendant dans la salle des petits déj de l'hôtel de Cuzco, attendant qu'émergent et viennent nous y retrouver les envoyés de Paris que nous cornaquions ?

Pourquoi juste et toujours à ce moment là ?

Quel genre de fil ténu, de canal de communication, de synapse, relie tout ça, sans raison autre que l'impression du lever du jour ? de l'attente au petit matin ?


F : placer en F, ce souvenir de (la) " Fountain " (de Nîmes).

Le 25 Août 1993, date mémorable pour la Cité des Antonins, s'ouvre l'exposition inaugurale du Carré d'Art, le musée nîmois voulu par le maire Jean Bousquet (Monsieur Cacharel, le roi du crépon, un visionnaire qui pendant deux mandats s'attachera à faire redécoller à grands frais la cité) mis en oeuvre par Norman Foster, le roi des transparences géantes assumant les confrontations historiques du lieu :

 "L'objet d'art au XXe siècle", une exposition en apparence sage et didactique reprise de celle du Centre Pompidou à Paris.

Mais voilà, scandale, double scandale!

                                                                trois quart de siècle après celui que suscita cet objet qui défraya les chroniqueurs et fut si mal reçu à New-York dans l'exposition des jeunes Artistes Indépendants, sa réapparition ici, en ce lieu faisant face à la noble et vénérable Maison Carrée, déjà tellement offusquée - selon l'avis de beaucoup d'autochtones - par la construction de l'éminent architecte britannique devenu Lord, réussit à faire, en sa radicalité première réactivée, presque resuscitée, doublement frémir la bourgeoisie HSP * nîmoise, car sans doute eut-elle préféré un musée moins iconoclaste mettant à l'honneur les peintres traditionnels de la Provence et du Languedoc, Nîmes la Romaine étant placée à leur confluant, mais aussi parce qu'un hurluberlu en panne de notoriété, un artiste de happening brutal vient d'y pisser dedans en public et pour parachever son oeuvre après tout même pas détournée, de le casser à coup de marteau.

J'ai déjà raconté ailleurs comment sans prendre la défense ni du créateur ni du casseur, j'avais été moi-même évacué d'un coup et banni de cette bourgeoisie après avoir lors d'un dîner mondain auquel j'avais le privilège d'avoir été convié, posé cette question, alors que le consensus s'était établi sur l'inconvenance absolue de cette première et fracassante exposition : 

- Mais alors à quoi, à qui fallait-il s'attendre dans un musée d'art contemporain ?  aux peintres locaux , au demeurant excellents, Fabre, Bazille, Bourdon ? 

* HSP : haute société protestante.


lundi 24 juillet 2023

Impressions d'Afrique (mes archivieilles et bien réeelles).

 En ouvrant la portière de la voiture retenant la capsule d'air réfrigéré indispensable au parcours bousculé/brulant, déjà irruption d'une impression, hélas plus qu'une impression, de chaleur étouffante qui envahit nez, membres, poumons, peau, cerveau. Une certitude, une évidence, une flagrance d'être de retour ici même et sur place, en Afrique. Cette Afrique où en descendant de l'avion on avait l'impression d'entrer au vagin brûlant d'une femme comme disait sans rire mais avec un sourire un ami peintre, ami d'un moment qui dessinait de petits tableaux tout simples et carrés, comme crayonnés sans manière, un peu tremblés.

Retour à ces temps où nous avions plongé non pas inconsidérément mais pour voir, pour aller voir vraiment ce qui se passait en d'autres côtés du monde, en d'autres vies que la nôtre, en un des quatre ou cinq côtés où nous désirions aller. L'Inde j'aurais aimé plus que la Chine, l'Australie aussi ou la Nouvelle Zélande. Ce fut Rio et sa canicule moite, et Kinshasa et sa chaleur d'orage permanent.

Il nous arrive sur la terrasse bien à l'abri de tuiles maçonnées, ici, dans une banlieue de garrigue de Nîmes la Romaine, légèrement en hauteur, d'éprouver exactement la même impression que sur notre terrasse couverte à Djélo-Binza, banlieue chic légèrement surélevée de Kin la Belle, autrement dit Kinshasa. Quand nous recevions des amis et que nous avions bu un peu de ce Bordeau importé rescapé de transports à hauts risques hors de caves doucement tempérées. Et que nous évacuions par tous nos pores en fin de repas, ce surplus de calories métropolitaines, en plaisantant sur les dernières déclarations du chef de l'Etat, d'ailleurs quel qu'il soit, ici ou là-bas, tout aussi surgonflées, écœurantes de forfanterie, loin là-haut ou tout prêt ici, prononcées en palais adéquats, préparés pour donner cours  à ce genre de discours déclamés et déclarés, par nature et destination, captieux, spécieux, fallacieux.

Mes archivieilles et bien réelles impressions d'Afrique, renaissent, ressuscitent, ravivées, en ces jours d'enfer où tout espoir semble vivre tremblant et rien moins qu'improbablement, assurément déjà annoncé comme tel, creux, creusé, retourné de l'intérieur, préalablement vidé, inversé, saboté à l'échelle de continents, colporté  dans des brumes de chaleur, venu de si loin, de temps immémoriaux de tromperies, turpitudes et dominations sans mesure propagées d'un hémisphère à l'autre, mots, intentions à peine voilées, déclenchant l'irréparable, les catastrophes annoncées, à court et à long terme, universellement, sans répit, sans frontières, sans scrupules que de pure forme et sans compensations que de témoignages de verbale solidarité. 

dimanche 16 juillet 2023

A9 ou le retour vers Tityre tu recubans sub tegmine fagi.

L'autoroute par où passe toute l'Europe, du camion lithuanien au vacancier suisse, pas seulement chargé de camions de gaz, de vin, d'oranges, de ferrailles, de BMW couvertes de coffres de toit, de planches à surf et de vélos dans des remorques, voie ouverte aux trains, bien réel antiferroutage réalisé sur route, de poids lourds sur deux voies là où il n'y en a que trois, aussi de rage d'arriver au plus vite et de soif de s'imposer avec ses maigres ou gras cylindres, nous a laissés rouler à flux continu, presque euphoriques, sans imposer son accidentel déraillement inévitable, son camion en travers, bloquant toute l'Europe sans issue ni remède ni voie alternative, à l'entrée de Sète ou de Gallargues le Montueux avec ses hautes tours sur la colline vues de loin qui ne sont plus synonymes d'embouteillage au péage depuis les travaux pharaoniques et la remise à jour et à plat du parcours tout autour de la nouvelle voie du TGV si décrié, si cher payé, si polluant, bourré, étalé, ravageur de campagnes anciennement tranquilles et destructeur d'écosystèmes irremplaçables. 

L'arrivée s'est faite aux cymbales, rythme gitan, des cigales un peu oubliées sous le vent marin et au chant de Tityre, le sacré Tityre (voir épisodes précédents et encore suivants), l'infatigable Monsieur Fauvette ***, plus en forme que jamais, qui bien reconnaissable d'une année à l'autre, au plain chant modulé, répétitif et bien typé, hante notre jardin aux herbes folles et durcies par la chaleur car il a plu un peu, assez pour que ça pousse en période où d'habitude ça meurt, un jour sur deux ici contre toute attente, et aux bambous qui se croient chez moi comme en lointaine Indochine et montent en flèche pour cerner le mas dingue un peu abandonné de lances dressées.

*** Monsieur Fauvette mélanocéphale 3 étoiles est un bel étranger qui revient chaque année de l'Afrique proche et que nous reconnaissons à coup sûr du fait de son chant particulièrement puissant et articulé, à la sonorité bucolique et virgilienne, à la différence des films et opéras actuels dans lesquels les comédiens et les chanteurs récitent de plus en plus négligemment de la bouillie incompréhensible. 

D'ailleurs, les petites Fauvettes à tête noire, femmes autochtones du quartier ne s'y trompent pas et manifestement l'adorent, il ne chaume pas et doit se mettre au travail dés son retour à chaque printemps sans prendre de répit. Combien de descendants de ce phénomène aurons-nous dans les parages ?