jeudi 11 août 2022

Petit matin du monde.

 Façon de parler . . . mais comment éviter la grandiloquente et terriblement égocentrique expérience quotidienne que nous avons tous ?

Et de quel monde s'agit-il d'abord ?

Soyons sérieux, il y en a tant, pour chaque "âme qui vive", voire chaque "existant" pensant ou pour le moins sentant, éprouvant, gonflé de vie. Chaque minou, couché au soleil à peine apparaissant, de ma voisine, chaque chien-chien des voisins aussi qui, il ne va pas tarder, hurle à la mort si fort pour son petit corps à ras de terre, dés que les "maitres" sont partis au travail / en effet, garder cette grande maison quand on mesure à peine 43 centimètres de long est une tâche épuisante et déprimante, faut le comprendre / chaque fourmi ailée cherchant dans l'air en train de se réchauffer, son fécondateur-trice, bref chaque parcelle de destinée existante sous le soleil peut revendiquer ce droit aux sensations du matin du monde. 

Certes pas le premier mais à chaque fois un miracle chanté par les anges incarnés en piailleurs, déjà disputailleurs, mais pas encore trop, volatiles qui traversent le ciel à toute allure dans cette fraîcheur si particulière, encore humide et sans vent, silencieuse et à peine moulue déjà par le grignotement de l'écureuil maigriot plus noir que roux qui trouve à chaque réveil son petit déj en "pignons" du grand pin là-haut. Et j'oublie volontairement ce monde subalterne des escargots, des limaces, des criquets, des lombrics qui retournent le sol en petits tas, des larves qui rongent les feuilles nuit et jour en dentelle et je passe sur l'infiniment petit des multi et poly cellulaires invisibles pour notre œil si limité en champ et en spectre.

Donc au milieu de ce grouillement, moi encore un peu, pour ce jour au moins, vivant, ne saisissant pour l'instant que deux couleurs de part et d'autre de cet horizon échancré, le vert des feuilles, herbes, aiguilles, décliné en toutes les tailles, formes et nuances du brun, du jaune au bleu, et justement au-dessus le bleu du ciel encore rougi du levant et vaporeux de nimbes nocturne, silencieusement, avant, juste avant les gros gratouillis et gratouillages, raclages, lissages, brefs et répétés coups de marteau, puis percements trouant les membranes, plus tant d'autres non identifiés vacarmes, que ne va pas tarder d'élever en oraison au jour besogneux et qui appartient aux futures victoires à venir, mon voisin matinal, courageux et irrespectueux, qui n'en finit pas de compléter, peaufiner, aménager, finaliser, aux horaires indus, sa maison toute neuve, terminée depuis deux ans déjà et jamais finie de finir, moi en cet instant de silence en sursis, très menacé de mourir vite, silence précaire et primitif, je crie intérieurement, silencieusement quant à moi, encore faut-il se dépêcher, ma joie. 

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