dimanche 27 septembre 2020

F de Froid.

 Je n'ai eu de cesse que de me mettre à l'abri du froid. Le pire étant le froid humide sous le crachin. La Bretagne, pourtant si belle et pas si glacée m'a contraint pour y survivre à m'inscrire successivement à deux mouvements subversifs et parallèlement à amorcer un travail bénédictin de thèse. L'exploration des criques, plages, caps, îles et cromlechs, presque déserts à l'époque, ne suffisait pas à me faire oublier ce froid (relatif) et humide (terriblement) qui perce le corps et l'imprègne de nostalgie, de regrets, de légendes, au travers des plus imperméables anoraks et cirés. 

J'ai quand même aimé le ski à l'occasion dans les Pyrénées mais pas supporté longtemps l'afflux des gens. 

Seule concession au froid, le bain et j'aime le bain froid pour nager aussi loin que possible.

Là je suis encore plus obstiné que dans ma fuite des courants d'air froids, des routes enneigées et verglacées. Je me suis baigné au Portugal ou à l'extrême nord de l'Afrique, en revenant des tropiques où l'eau à 27 ou 30 me ravissait, entre novembre et février dans des eaux où il n'y avait pas un chat où l'on me surveillait de peur que déjà avancé en âge je disparaisse dans l'Atlantique à 13 ° ou peut-être moins ce jour là après une averse glacée, avec de grosses vagues et une eau trouble. 

Préférant des parages naturels je peux presque tout aussi bien prendre un plaisir purement physique à faire des longueurs dans une piscine même glacée si les transparences m'y incitent mais je suis un espion venu du chaud. J'ai tout essayé dans les eaux poissonneuses et coraliennes. Là le corps renait et s'étire en déroulé et flexibilité. Mes meilleurs bains : Cayenne entre deux moments difficiles pour mon travail et une nuit en vol de nuit, dans une eau rouge de boue restant collée en croûte à la peau, îles du Rosaire en Colombie sur un îlot désert, dans une eau cristalline et peuplée de vie, juste avant le bombardement de l'Irak qui allait faire le tour du monde sur CNN, déclanchement de la première guerre du Golfe, enfin, dans la Mer Rouge, à la frontière Egypte-Israel, dans cet aquarium géant aux poissons multicolores qu'Allah ou/et Jehovah se sont peut-être après tout entendus, pactisant avec Dame Nature, à placer aux confins du désert.

En hiver, j'ai donc quelque plaisir à remettre des gros pulls et même un vieux et grand manteau d'alpaga que j'ai fait tailler au Pérou, mais cette impression de disparaître en tant que corps ne me quite pas. Alors je marche pour exister encore. Je fais de la gym, me suspends au portique. Je soulève des poids et je coupe du bois.


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