samedi 20 juillet 2024

Corps (un autre).

Oui, chaque été, un miracle m'attend.

Renouvelé.

Renouvelé par ce combat au ras des flots où sans lunettes de soleil (rires), car ne pas tenter de nager debout . . .  tête bien plongée, corps à plat enfoncé dans l'eau, je dois pivoter et agiter les bras en manière de rames, en moulin, en pales d'hélice, en creusant légèrement la main au plus profond vertical, aller chercher l'eau au fond, peu importe la trajectoire en haut au dessus, et à l'autre bout du corps agiter les pieds en arrière, cuisses tendues sur un autre rythme que les bras, plus saccadé, tapant le dessus du pied pour éviter au corps de perdre sa trajectoire horizontale cela tout en soufflant dans l'eau pour de temps à autre, ensuite, dans un deuxième temps rythmé, bien et rapidement respirer, aspirer une bolée en coin, une goulée d'air salvateur, bouche ouverte, soit d'un côté soit de l'autre, 

le tout en rampant d'une seule venue comme un serpent sur ce liquide au goût d'huitre et de sel, 

combat éclaboussant ou plus ou moins coulé, et si possible (tout en un) il faut ouvrir les yeux, les laisser sans arrêt ouverts, même sous l'eau surtout, ne pas se laisser surprendre par la vague brutale après les vagues courtes ou tel corps mort ou quelque maudite méduse, voire un autre nageur ou pagayeur qui arrive en face ou en travers à fond, . . . dans une sensation d'ensemble de corps perdu, de combat fluide, de propulsion plus ou moins glissée . . . 

. . . . cela et cette froideur de l'eau qui pénètre fait que peu à peu naît, force et souplesse primitives retrouvées, parfois enfin à l'aise dans le mouvement, renait, dans la coulée, par métamorphose, vraie renaissance, un autre corps perdu durant l'hiver et la demi-saison qui ne permet pas dans l'eau trop glacée, la longue immersion nu, sans obstacle, sans appareil, qu'aucun poids, mouvement, machine, barre, gym ou travail imposé ne parvient à recréer, mais ce corps là, parfois, au bout d'un effort tendu et fluide, ce corps d'été renaît . . .  ou pas.

C'est ma hantise, chaque saison ce nouveau corps avant l'accomplissement espéré,

plus agile, plus souple, plus délié, que renaisse 

plus tardivement, repris par la pesanteur, les craquements, rouilles, engourdissements, raideurs, gauchissement des articulations, 

plus difficultueusement jusqu'à sans doute ne pouvoir 

plus.

Et alors sans doute je n'aurai même pas, 

plus, du tout envie de bain ou de seule trempette.


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