vendredi 6 novembre 2020

Tueur (en série).

Il y eut d'autres époques. Celle des grands guerriers, d'Achille de Troie à Roland de Roncevaux, longue période où se succèdent toutes sortes de Bayard ou Du Guesclin, nos héros.


Ensuite, bien plus tard il y avait eu l'immense Quichotte qui était déjà magnifique mais un peu dérangé.

Puis reparut d'Artagnan, le personnage de roman, (1844) après Quasimodo (1831). Enfin vint le polar fils de la révolution industrielle déjà incarné par le détective Auguste Dupin d'Edgar Alan Poe dans le Double Assassinat (1841). Là comme les dates tout se resserre. 
Nous entrons dans la période féconde et terrifiante où industrie, culture populaire et goût manifesté (faut-il le croire ?) par le public, goût du mystère, de la mort, parfois du fantastique - ça commence réellement avec Jackie l'Eventreur comme personne et personnage (1888), ça avait pris un développement littéraire avec Eugène Sue (grands feuilletons de 1842 à 1845) ah Eugène, c'est lui que je préfère à Dumas et bien d'autres, sans parler du Comte mort dans le neuvième et natif de l'Uruguay . . . et bien d'autres, et bien d'autres . .  - et peu à peu, de plus en plus souvent du lugubre, du trash, du glauque, du  morbide, émerge et submerge en surenchère de scénario alambiqué en meurtres croisés ou imités et pris en référence comme maquette débonnaire et banalisée de quintessence d'horreur à répétition sans beaucoup d'imagination ni d'effort, le roman, le film, la série supposée tenir en haleine le pauvre spectateur bercé par des musiques mystiques ou du folk song sympa, ou pire la comptine enfantines dans les plus mauvais.

Point culminant et plateau (altiplano) atteint : le tueur en série mon triste, bien triste contemporain.
Tueur à répétition décrit et déployé en usant systématiquement jusqu'à la nausée de toutes les variantes.

Alors la question pourrait être : sommes-nous des victimes enfermées dans nos fantasmes d'horreur et surtout de peur entretenue et cultivée, par une société qui nous broie et mouline, machine effroyable qui nous domine ? Une société qui ne nous inspire qu'effroi, dégoût, tremblements des membres, nausée, suée de cauchemar ? Ou est-ce le développement de nos désirs d'exploration au-delà des limites déjà atteintes par l'art, l'imagination, la représentation, y compris dans nos divertissements qui nous pousse à nous jeter dans cet enfer de l'imaginaire, qui fait que nous sommes incapables d'envisager le monde, nos semblables, nous-mêmes et notre avenir autrement que sous ces espèces catastrophiques ? cataleptiques, paralysés, ligotés, hallucinés que nous serions dans un univers créé par nos cervelles ?
Pour ma part, je répondrai les deux mon capitaine.
Nous tournons en rond dans la spirale d'un maelstrom.

C'est pourquoi, ô espoir dérisoire ! j'ai rêvé longtemps de créer (et peut-être de vivre en partie) le personnage tout aussi hors-norme, franchissant de multiples frontières, fascinant, tordu et approfondissant tout autant des perversions exploratoires perturbant et son être et le destin des autres, mais à mon sens, plus ouvert sur le monde, plus curieux, plus banal somme toute, plus universel puisque nous sommes rarement des tueurs mais sommes tous lui, dédoublés, comédiens, joueurs, observateurs de nous-mêmes et des autres, 
j'ai rêvé de
et vous êtes vous aussi donc . . .  l' espion.
(Mais aussi secret soit-il par définition, peut-être méritera-t-il un jour un autre article.)



Note : bien sûr ces remarques ne prennent nullement en compte l'univers extrême oriental du polar chinois du conte horrifique japonais, du récit populaire horripilant au sens premier transmis en Auvergne autour de la cheminée en hiver. Immense univers des peurs qu'on se donne à plaisir. Et sans parler encore du récit des divinités de cimetière haïtien ou des histoire qu'on se plaisait à me raconter dés mon arrivée dans les soirées mondaines ou pas au Congo.

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