vendredi 26 mai 2023

P de pourquoi ce rêve étrange et attirant ?

 Il y en aurait (tellement, tellement) des "pourquoi". Le monde en est fait depuis la petite enfance jusqu'au firmament des télescopes géants. Peut-être le cosmos lui-même, hors vision de l'espèce humaine, est-il tout entier en lui-même en emboitements, en recherche et conquête, envahissement du vide par le sens, ou son absence, né chaque jour d'un nouveau développement et produisant au fur et à mesure un nouveau train de conséquences, dépourvues de sens de notre point de vue, ne participant qu'à une logique extraterrestre . . . et si, dans mon espace de conscience ultra restreint, infra minuscule, j'examine ma vie (autant qu'elle m'appartienne). . . ne suis-je pas là pour ça, au moins en partie (élucider quelques pourquoi ?) . . . à mesure que vous pouvez, vous aussi, la visionner et en juger, telle qu'elle apparait . . . avec insuffisances et ridicules, non dits criants, aveuglement sur ma bêtise et mon ignorance mais poussant en avant comme si de rien n'était, parfois avec un sens à retardement, un sens qui ne se dessine rétrospectivement que sous de nouvelles circonstances et perspectives, celles des lumières d'un autre temps, . . . / / / / reprise : si je crois faire apparaître des figures, des vecteurs et des liaisons/équations qui me restaient totalement inconnus, ou restaient à peine perçus dans un coin de l'œil, du cerveau, de l'oreille, ou quelque autre partie du corps, puis se trouvaient comme par hasard (volontairement ?) oubliés, le plus souvent, en vérité, je tombe sur un trou noir, un pur mystère, dans le meilleur des cas une succession d'indices, de rappels, traces, "pistes", faux signes de sioux, clous plantés d'écritures non déchiffrées, ne conduisant nulle part, au moins nulle part où je voudrais (pouvoir), (jusqu'où je serais prêt à) aller, au bord de points aveugles et de gouffres, volcans éteins ou bouillonnants, mais rouges puis noirs, cercles vides à ma perception, à mon intellection, périmètre opaque, sol de braises, comme ceux qui font qu'on sort d'un rêve parfois pour s'éveiller (effacement immédiat alors d'un restant d'image floue, tache aveugle totale, envahissante) devant tant d'insupportable, d'émoi, d'effroi, d'effets de feu liquide dans les veines bouillantes, brûlées, et être ainsi lucide, droit, debout, aveugle, Œdipe aux pieds insensibles et gonflés et sûr de ne plus pouvoir ni vouloir voir ni savoir. Ainsi . . . 

L'autre nuit j'ai rêvé d'activités qui avaient trait à ma vraie vie en partie faite de contacts avec des créateurs, ça a été mon métier pendant presque, non, plus de la moitié du temps de ma "vie active", vie aussi faite simplement de goût pour l'observation et l'intervention dans ces activités créatrices exercées sous mes yeux par d'autres que moi, comme spectateur et parfois organisateur marginal ou critique et journaliste bénévole, ou encore comme recherchant perpétuellement à fréquenter et essayer de comprendre ces univers qui m'étaient étrangers parce que relevant de vies consacrées à créer des univers mémoriels et utopiques totalement hors du mien.

Comme par exemple, avant de partir au Brésil, dans cette bonne ville de Limoges que j'avais gagnée après 68, en partie "limogé" après mes actes d'agitation en Bretagne, mais surtout pour rejoindre celle que j'aimais qui s'y trouvait elle-même parachutée et où, professeur et collaborateur de deux journaux locaux, avec un critique marxiste, un poète très engagé tout en étant sans arrêt en décalage, un peintre déjà reconnu mais qui peut-être par moments pouvait encore douter, un plasticien collectionneur très marginal, un ami directeur d'institution universitaire auteur de livres didactiques, nous avions commencé à faire fonctionner un groupe de recherche, débat et réflexion sur les textes de Guyotat et la peinture de Hartung, entre autres thèmes d'études.

Dans mon rêve nocturne, non situé, je ne sais plus en quelle langue ça parlait, je devais organiser quelque chose comme une manifestation comportant un exposition d'objets "abstraits" mais chargés de significations affectives et/ou magiques, en tous cas chargés de puissance et parallèlement des "rencontres" avec des plasticiens et théâtreux mettant en scène ou improvisant un happening où ils s'interrogeaient sur leur recherche, leur travail, leurs interrogations, leurs terreurs, leur vie quotidienne traversée de part en part d'obsessions liées à leur création, à l'étrangeté du monde, aux relations du couple, . . . . à la beauté de l'absurde.

Et j'étais dans ce cénacle tout à fait admis, malgré ce regard critique qui aurait pu déranger, mais c'était moi qui me sentais très étrange, nageant à la fois dans le bonheur, la peur au ventre, comme si c'était moi qui devais jouer ma vie sur ces choix incongrus : ne plus vivre que pour essayer des avancées, de petits topos ouvrant de modestes mais nouvelles voies, à la poursuite d'une oeuvre à construire pas à pas, sans fin que la mort.

Et j'étais en même temps heureux et amoureux et effrayé, attiré par ce vide et cet appel suicidaire au néant que constitue en risque mais aussi en valeur centrale toute oeuvre en gestation et aussi tout amour humain, en l'occurrence ici bien sûr il y avait une femme délicieuse et j'étais ivre de bonheur.

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