mardi 18 mai 2021

Tasses cassées.

 J'avais rêvé juste avant de poissons dans les rivières. De resencement de cours d'eau, de cartes, d'administration et cela ne me ressemblait guère, j'ai administré c'est vrai mais ne me suis, dans ma vie, que peu intéressé aux poissons de rivière, plutôt à ceux qui affrontent la mer infinie. Impression au matin d'avoir rêvé pour rien. Un de ces rêves dont on pourrait bien se passer, lié au hasad de l'utilisation de matériaux tournoyants en résidus inutiles dans la mémoire oubliée. Pas plus d'intérêt que les veines et les boursouflures infimes d'un petit caillou qui serait entré on ne sait comment dans la chaussure.

Au matin, ma compagne avait froid et est venue contre moi.

Elle avait sa voix ancienne, des premières fois où nous nous étions rencontrés. Une voix calme et douce aux finales interrogatives, attendant sans doute une réplique, un acquiescement au moins. Elle qui n'aimait pas trop parler, surtout au lit dans le petit matin, s'est mise à raconter une histoire de tasses. Une histoire de tasses cassées depuis le début lointain de notre vie en duo.

Or, nous en avions cassé des tasses; toutes sortes.

A commencer par celles de notre déjeuner tête à tête, offert lors de notre mariage officiel. En porcelaine délicate, décorées de motifs en guirlandes bleu-rose-mauve à noeuds festifs.

Ensuite vinrent les autres. Toutes les autres. Les chinoises imprimées à la va vite de motifs finalement tout aussi charmants. Les italiennes décorées de points peints au pinceau minuscule. Les tasses péruviennes entièrement tournées et modelées à la main en céramique légèrement poreuse si faciles à ébrécher, sans doute insuffisemment cuites; la brésilienne rescapée de tout un service champêtre peint en un tourne main léger de fleurs très stylisées mais parfaitement réussies; et aussi celle dont la soucoupe était animée d'un chat se tordant pour faire sa toilette, élégant et banalement incongru comme chat mais presque original comme représentation figée sur un objet dur . . . etc . . .

Cette litanie nous avait raprochés et fait remonter le temps jusque . . . jusqu'à ce que le vrai réveil tasse et casse ce rêve prolongé d'une si longue vie, encore allongée d'un songe doux entre sommeil et reprise des habituelles tâches de cet autre jour où toujours des surprises, bonnes, mauvaises, effroyables ou sans importance pouvaient surgir, on ne pouvait savoir; car elles attendent tapies après le café ou thé, ce sursis du rompre le jeune après lequel on plonge habillé dans l'inconnu. 

Ce jour-là étrangement quand nous avons fait notre tour dans la garrigue habitée et jardinée, la chevelure nouvelle de l'arbre à perruque nous attendait.




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