vendredi 6 octobre 2023

Le sentier des douaniers.

Il y a des années que j'y chemine.

J'y vois seulement avant le crépuscule, à mesure que les estivants à la peau dénudée et boucanée fuient, encore en tenue légère pour accomplir la route, pour regagner et remplir rageusement leur labeur et leur devoir social dans les cités grises, polluées et embouteillées, les pêcheurs infatigables, à contre jour sur le ciel, dans un grand bruit d'énormes diésels poussifs secouant la terre, qui partis tôt le matin aux premiers sifflements des étourneaux sortis à ce bruit en bande des arbres suffisamment éloignés du rivage, à l'abri de l'humidité, dans l'aube naissante, rentrent la barque à peine pleine ou, rarement encore, à moitié vide, après avoir étendu leur chalut sur des kilomètres au fond d'une mer autrefois surpeuplée, à l'heure calme où je sors avant le couchant de cet été qui brûle et n'en finit pas.

Les pensées ailleurs, les images dans ma tête défilent comme les vagues à petits plis, j'examine au bord du rivage ces rochers granitiques en amas et chaos qui dessinent sous l'eau cristalline ou à fleur, des pages d'un géant livre ouvert en blocs épaissis, éparpillés et pétrifiés, sous la couverture pesante, déchirée, gravée en caractères archaïques devenus incompréhensibles, ou ces rocs dominant le flot, en crânes immenses, yeux caves, trous rongés en chaudrons, d'oiseaux géants éteints depuis des millénaires.

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