dimanche 22 octobre 2023

Maîtres baigneurs, Salva Vidas et autres Sauveteurs qu'il vous soit rendu grâce.

 Je l'ai déjà dit, je sais je radote, mon arrogance quand je nage - et si je porte mon maillot rouge surtout - fait qu'on a pu parfois me confondre avec le maître baigneur de la piscine (quoique maintenant et depuis longtemps je me sois et suis débrouillé pour éviter les piscines forcément toujours trop courtes, trop envahies, sans parler de la qualité de l'eau et du chlore, en tâchant d'être, aussi loin que j'en sois, finalement, par chemins détournés, pas trop éloigné de la mer, cette dernière étant, à mon échelle de petit baigneur, presque infinie d'étendue et presque bonne à boire avec son goût d'huitre inimitable. Arrogance oui, car pour bien nager : ne pas hésiter, faire les mouvements à fond, bien lancé, bien plonger la tête pour se sentir allongé et porté, transporté et baigné, car c'est vrai, par moments j'y vais à fond ( et oui les gens . . . ne pas garder ses lunettes de soleil et l'air dégouté vouloir à tout prix, debout dans l'eau, ménager sa permanente et friselure, car à nager debout tête haute, on y perd tout plaisir ) mais soyons honnête je ne suis pas forcément des plus efficaces et n'arrive pas toujours en corps à corps à faire vraiment corps avec l'eau, surtout quand cette douleur à l'épaule et dans l'omoplate que j'ai contractée en sciant trop de bois à la main par horreur du bruit, se déclare et ralentit mon élan.

Mais le fait est là, j'ai eu pour amis quelquefois des sauveteurs, dont celui-là maintenant disparu, un ancien maître baigneur arrivé à Menton, quand il venait de franchir tant de frontières et puis en dernier obstacle les Alpes, sorti de Hongrie au pire moment en passant par l'ex-Yougoslavie, qui sans s'en offusquer était un peu jaloux que les mères de famille viennent me demander de donner des cours de natation à leur progéniture, plutôt qu'à lui. En attendant c'est lui qui m'a fait sentir plus maître sinon du bain, du moins de mon corps, en m'expliquant et me montrant que les trois quarts des gens faisaient en nageant des mouvements qui les freinaient fort dans le temps synchronique où ils essayaient désespérément de se propulser. 

C'était par ailleurs un mec prodigieusement généreux et pas triste malgré toutes les mésaventures et barrages ou brimades qu'il avait dû affronter étant étranger avec un fort accent, petit, gros, sans diplômes valables dans notre pays, (mais malin et rigolard, fort en plaisanteries toujours tellement décalées qu'on pouvait dire !) juif persécuté par surcroit.

Auparavant ç'avait été, très tôt déjà, une simple histoire de maître baigneur au grand cœur qui était venu parler à mes parents qui ne savaient pas nager . . . . que la plage la plus proche du Rocher de la Vierge à Biarritz n'était pas la meilleure pour un gamin qui ne savait pas nager non plus mais affrontait les hautes et traîtres vagues à surf et qui leur suggéra dés la deuxième conversation d'aller faire un tour avec moi à San Sebastian, de l'autre côté de la frontière, dont la baie bien ronde, bien profonde et bouchée par une île, pourrait, immense baignoire très chic, mieux me convenir. C'est d'ailleurs là que j'ai appris, observé, œil en coin par les bonnes d'enfants à landau depuis la promenade, en m'obstinant seul, à nager vers dix ou onze ans.

Sans parler de la suite. Ce maître baigneur de Biarritz (encore) qui vint me "sauver" quand j'était perdu au Sénégal au large du Cap Skirring, emporté par un courant, à bien deux ou trois-cents mètres de la côté, juché sur des récifs un peu tranchants, mais providentiels déjà, à fleur d'eau, faisant des signes et ne  pouvant revenir. En fait il donna l'alerte et l'hôtel (nouveau, à peine construit, imprudemment établi face au courant intermittent et funeste ) qui, n'ayant en outre pas encore de canot, délégua des pêcheurs en pirogue pour venir nous chercher moi et lui, le sauveteur venu courageusement me rejoindre pour me réconforter et m'assurer qu'on avait déjà sauvé ma fille de ce fameux courant épisodique et trompeur qui bizarrement m'avait emporté plus loin et dont je n'avais pas su sortir.

Voilà pourquoi sur notre plage tranquille de l'été (début et fin de saison) je suis tellement heureux de parler à ce nouvel ami venu de Patagonie dont je vous reparlerai, qui depuis trois ans déjà emporte la palme avec son équipe de surveillance attitrée du bain en crique dans ce village catalan si près de la frontière.

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