mercredi 23 août 2023

Chambre claire (que se passe-t-il dans la . . . ?).

Bien sûr c'est un instrument inventé par Wollaston en 1804 utilisant un prisme pour renvoyer une image sur la feuille où dessine le dessinateur et ainsi, théoriquement lui faciliter la tâche par l'entremise de cette camera lucida . . .

Bien sûr on ne peut que penser au livre de Roland Barthes, La Chambre claire, 1980, qui joue sur les mots et parle dans son livre de la photographie, fille plutôt de la chambre noire (camera obscura).

Bien sûr, la réflexion de David Hockney, Savoirs secrets, 2001, vient à point. Tout au long de l'histoire de la peinture et du dessin on a utilisé des artifices qui mis bout à bout et sans arrêt perfectionnés ont donné (ne pouvaient que donner ?) naissance à l'appareil photographique.

Et je rêve un peu sur ce vieux et fameux lexique des termes d'art publié par Jules Adeline en 1885, dessinateur et graveur savant,  que j'aime de temps à autre ouvrir au hasard et feuilleter qui dit exactement :

"Toute la difficulté de la chambre claire consiste à ce que le dessinateur doit avec le même rayon visuel regarder l'image à travers le prisme et suivre aussi la pointe de son crayon pour relever le contours de ce images."

C'est bien ça, il serait absurde et naïf d'imaginer que les techniques qu'on invente sont là pour nous faciliter réellement la vie. Qu'elles la compliquent, s'arrangent pour la questionner, pour faire apparaître en arrière fond, derrière l'apparence et au travers d'un apprentissage nouveau, des mondes instables, insoupçonnés, irréconciliables avec les anciens, et peut-être en partie incompréhensibles, ça oui.

Barthes y rencontre, lui, l'inconsolable, l'obsession de sa mère au travers des images qui subsistent d'elle, arrêtées dans la vraie vie qui en devient irréelle, découpée en moments figés sous ses yeux. Puisque son livre de réflexion partiellement théorique devient sous notre regard, à mesure que sa lecture avance, réflexion personnelle, intime et orientée vers l'image et finalement la représentation de la mort.

Hockney défait le mythe du peintre sur le vif du sujet, comme si ce vif n'ouvrait pas la porte à un lent et long travail de recherche sur le motif, autre chose qu'un calque. car le plus grand des génies du dessin, Ingres y compris, doit bien partir de techniques répétées et maîtrisées, d' "études", pour percer le réel, le capter, aller au-delà du "coup de crayon" virtuose qui lui-même repose sur quel entraînement et quelle expérience ?


La lumière la plus crue, l'image la plus nette, l'effort que nous faisons pour dissiper l'incertitude, le flou, la technique et la dextérité, l'agilité la plus fine de nos sens, la perspective maîtrisée, l'anamorphose, nous enfoncent dans l'ordre des questions hiérarchisées, arborescentes, leur sens multiple et leur polyphonies surdéterminées à mesure que l'épaisseur du réel se dévoile et se dérobe.

                              L'Ombre. Dare Dovidjenko Bozanic, peintre né à Split. mort à Lima.



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