samedi 24 décembre 2022

Deux chevaux (suite I)

 Je crois que c'était avant, un peu avant - car avant cet accident qui n'était de mon fait que comme moniteur bénévole - j'avais justement la réputation, mais ce n'était que relatif, d'être un assez bon chauffeur déjà chevronné et tout type de volant, j'avais eu cet incident avec une amie apprentie psychologue qui m'avait fait conduire, elle disait ne pas aimer conduire, son vieux trast, heureusement sur un assez court trajet, son char, une vieille 2 CV peut-être accidentée et de toutes façons mal entretenue et restaurée "qui tirait à gauche" comme elle avait dit pour me prévenir. Ben oui, elle tirait tellement à gauche que j'avais, bien sans le vouloir, mordu la ligne jaune continue dans un tournant surveillé par deux motards qui venaient de s'y mettre aux aguets dont l'un qui sans quitter son casque souleva ses lunettes pour me dire quand il m'eut fait signe de me garer sur le bas-côté :

- Vos papiers, j'espère que vous êtes en règle.

Je lui présentais mon permis à trois volets roses que j'avais obtenu un peu par chance, quand on débute même avec un peu d'expérience on est assez pataud, en manœuvrant, j'en étais rétrospectivement fier, dans un quartier animé de Toulouse où l'examinateur m'avait fait faire sadiquement, m'ayant prévenu de m'arrêter un peu tard, une assez longue marche arrière pour me garer. 

- Profession ?

- Elève-professeur.

-  . . . .

- Etudiant ? finit-il par articuler après s'être creusé la tête pour ramener mon cas à une case connue.

- Oui, j'essayais d'expliquer simplement, je suis en apprentissage pour devenir professeur après un concours. 

C'est alors qu'il me déclara que c'était précisément ce que son fils souhaitait faire. Je lui proposais de lui donner des conseils et éventuellement même de l'aider. Tout plutôt que de le voir s'intéresser à l'état de la voiture. Ma copine me donnait de petits coups dans les mollets, usant de sa chaussure excessivement pointue. Sans doute pour que j'abrège la conversation et que nous repartions au plus vite.

C'est à ce moment là qu'apparut un véhicule écarlate, trapu et collé à la route, qui débordait largement sur le milieu de la chaussée et dont le conducteur, au lieu d'obtempérer aux signes des policiers, voyant la scène que nous formions, s'éclipsa dans une accélération vrombissante et quelque peu insultante. 

Je n'ai jamais vu un motard démarrer ainsi, l'ai-je rêvé plus tard dans d'autres circonstances ? il me semble que celui des deux qui ne s'occupait pas de moi, fit partir sa moto toute droite et seule sans cavalier, comment cette manœuvre était-elle posible ? je n'y connais rien en moto . . . et dans l'élan, sauta dessus comme sur une monture vivante avant de faire encore un véritable bond de cascade par dessus le talus qui bordait la route pour entamer sa poursuite, bientôt suivi par son comparse qui nous abandonna.

Ainsi grâce au chauffard à bolide, avions-nous sans doute évité l'immobilisation et la réquisition du véhicule dont l'inspection allait révéler la direction faussée, les feux hors d'état et les pneus usés jusqu'à la corde. Toute ma vie depuis je me suis défié des psy, et surtout de leur rendre service, motorisés ou pas.



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