mardi 29 octobre 2024

Plomberie.

 J'aurais dû ajouter à toutes mes longues études (si je compte celles que j'ai faites après les études officielles, quelquefois longtemps, en rab de curiosité pour aller voir plus loin si le ciel était moins gris et si l'herbe moins tondue) celles de tubulure et plomberie. 

Pas évident d'arrêter l'eau. De l'empêcher de couler au moins goutte à goutte une fois tout vissé à fond. 

Bon c'est vrai le matos actuel tout en plastoc toc de plus en plus léger genre membrane papier à cibiche, ça n'arrange pas les choses, ça se tortille dans tous les sens comme une chenille "arpenteuse", dés que vous avez fixé un truc à peu près bien droit pour visser les autres bouts et appendices du tuyau, ça danse du ventre, ça gigotte et ça déhanche les pas de vis, puis ça part en vrille et en soufie.

Ah je vous l'dis, c'est pas du cuivre ni du laiton.

J'aurais dû aussi faire des études d'ingénieur informatique, ça m'aurait évité de me tordre le cou, de boire le bouillon à chaque manœuvre pour simplement comprendre les symboles, raccourcis et astuces de la mise en page et tabulation sans faire sauter d'un coup tout le texte et perdre le brouillon.

Ah j'vous l'dis, c'est pas béton.

Et puis aussi tant que j'y étais j'aurais dû avoir plusieurs vies, un tas, pour arriver à avaler tout ça au pas de course sans trébucher, sans m'étrangler ni m'escaner, ni m'escagasser et même les prendre en déglutition par anticipation ces années et nouveautés, pour ne pas être surpris des superbes nouvelles procédures de moulinage, d'emberlification et embobelinage./

Obstination.

Plus que persévérance, obstination.

Pour arriver à quoi que ce soit, il en faut. Beaucoup. Une obstination continue qui confine à la folie.

Encore faut-il avoir pris le bon parti. Mais il est rare qu'une obstination continue et raisonnée, même folle et délirante n'aboutisse pas. N'émerge pas du quant à soi aux lumières publiques. Quitte à apparaître telle démence grave ou folie douce. Il faut tenter et parier. Affronter la sortie, le dialogue. La chute.

lundi 28 octobre 2024

Chance(s) incroyable(s).

Tout n'est que hasard. 

Une sorte de dieu de loterie. 

Nous sommes si nombreux à être éjectés et jetés là dans la machine de tirage au sort qui nous expédie comme des billes dans cette existence aux plans plus ou moins inclinés, au sol chaotique, creusé de vals, percé de pics, piégé, embroussaillé. 

Trajectoires dérisoires.

On peut évidemment y lire un destin (toujours singulier, même celui des plus fortunés, ou celui des plus disgraciés ici-bas, sur cette croute que nous ravageons) si on a en soi (mais qu'est-ce que cet "en soi" ? de quoi est-il fait ? à qui le devons nous ?) parasites forcenés, beaucoup d'espoir, d'optimisme, d'imagination, de foi en son étoile, d'égocentrisme et de crédulité, obsédés du sens comme nous sommes. 

Bref de vitalité exubérante (encore un sacré cadeau!).

Je me souviens de ce proviseur du grand Lycée Daudet de Nîmes, une institution d'éducation et d'architecture, qui avait dû être remplacé après qu'on eut découvert ses crimes pédophiles et dont pris le poste un homme intègre, apprécié de tous et qui eut le mauvais œil de passer sur un tronçon d'autoroute qu'il aurait pu ne pas emprunter. 

Vengeance décalée du hasard. Tueur à gage qui se trompe de cible. C'était un discutable raccourci pour un trajet relativement court, ou qu'il aurait pu notre nouveau proviseur, fort bien emprunter un autre jour. Il périt, assez peu de temps après sa nomination, encastré dans son véhicule même pas à cause d'un chauffard ou d'un camion placé en travers, mais, cause beaucoup plus rare, sorte d'absurde châtiment exemplaire exécuté par erreur, à cause d'un camion passant sur la voie qui enjambait l'autoroute, au-dessus. Sans tomber lui-même, ce camion laissa choir juste en plein sur l'habitacle en mouvement une part de son chargement. Un gros bloc de pierre mal arrimé sur sa benne maudite.

Inversement vivre encore c'est avoir réchappé à tant d'erreurs, d'accidents, d'imprudences, de causes de maladie, de contagions, . . . . de malchances.

La chance majeure qui m'advient aujourd'hui comme chaque jour quand je suis présent ici, je l'ai voulue certes mais elle est le fruit de tant de choix emboîtés et finalement imprévisibles, construits en mettant bout à bout de petits morceaux de circonstances, c'est que je suis, 

vivant encore dans un jardin,

c'est à dire un petit morceau de cette surface de terre qu'il m'appartient de préserver de tout ravage d'herbicides ou pesticides, de tout tronçonnage ou arrachage d'arbre qui ne soit absolument exigé par la sécurité, petit territoire fait de grandes hauteurs de végétation et de buissons et de haies où niche tout un peuple volant, rampants, courant, nocturne, diurne, chantant et bruissant,

où j'ai ici tant de recoins qu'il ressemble pour moi à un univers resserré (peau de chagrin dérisoire)  en maquette miniature et sauvage, permettant à la maison qu'il accueille de préserver en paix, mas dingue, demeure du repli de mes troupes, désirs exhaussés ou non, toute une histoire mienne, souvenirs et résidus d'amitiés, rencontres, étonnements, éclats, aperçus, lueurs, écoute des nouveaux et lointains amis. 

dimanche 27 octobre 2024

I d'Inspiration.

 . . . "insufflation, comme s'introduit l'air dans la poitrine", les anciens reliaient l'inspiration au souffle qui ne pouvait être que divin.

Difficile de dire ce qu'elle est. Plus facile ce qu'elle n'est pas. Quand on n'est pas inspiré, chacun voit ce que ça donne : un flop. Les choses qui auraient pu bien partir après un bon démarrage, un joli bruit sans raclement ou crissement de raté, s'affalent au sol, très platement au lieu de décoller. Comme un ballon qui se dégonfle. Comme un saut qui fait plus qu'accrocher la barre, qui passe ridiculement, sans même la toucher . . . en dessous. Comme une pub qui tombe à côté, une astuce que personne ne comprend, une mesure faussement astucieuse qui se retourne contre le spéculateur. un impôt qui mécontente la majorité des citoyens et ne rapporte rien. Un trou percé dans les fortifications de l'ennemi par où sort cet ennemi qui s'y attendait et vous massacre.

Mais alors être inspiré c'est quoi ?

C'est en effet une pure question de souffle. Quand on cherche et travaille, non pas dans l'angoisse mais dans l'espoir de trouver et d'aboutir, tendu et à l'écoute, concentré au maximum, le souffle se bloque, le corps se raidit, manque de souplesse et d'équilibre, le trébuchement n'est pas loin mais c'est alors que parfois il arrive que comme au sortir d'un rêve agréable (c'est en effet assez rare) ou d'un bon sommeil (certains le cherchent en vain), le corps se détende brusquement ou plutôt, beaucoup mieux, lentement d'un coup en douceur, l'idée apparaît, la perspective se dévoile, fantomatique, à peine dessinée, on respire enfin, tout ce détend, il ne reste qu'à cueillir le fruit, à laisser apparaître et accoucher la forme qui pourra, devra être travaillée pour satisfaire les exigences.

Mais alors d'où vient ce souffle, cette respiration ?

Quant-à moi je répondrai : d'un travail du corps, des cellules, des tissus, des molécules, des synapses. Un travail qui s'est poursuivi en arrière plan dans la chair. L'intellect, les anciens l'avaient bien noté, exige une dépense physique d'énergie. Une combustion. Le cerveau est un muscle comme les autres et dépend de la cage thoracique et du cœur, des mouvements du plexus et des pectoraux, de la tension des cuisses et de la nuque. L'inspiration c'est comme travailler dans une mêlée au rugby et sentir tout à coup, solidairement, que le mouvement se met en place et que la tension se résorbe en avancée. Que l'ovale de la balle sortira du bon côté.

samedi 26 octobre 2024

Conscience d'être toujours enfermé.

 Education, amis, cercles de pensée, chapelles, partis ou sympathie pour un parti, formation, et mon corps, mon corps qui n'est pas un autre corps, mais le mien si particulier, ma forme d'esprit, maison à étage sans escaliers intérieurs sinon encombré bizarrement de toutes sortes d'objets rendant la progression difficile, ne communiquant que de l'extérieur par ascenseurs de façades et terrasses, et alors distraction totale, happé par d'autres centres d'intérêt, donc je m'évade constamment.

Enfermement.

Je ne suis pas claustrophobique mais ne supporte pas longtemps d'être enfermé. Il faut que je sorte, que j'aille marcher. Au moins à l'intérieur de ma forteresse, aux quatre coins des murs clos de mon jardin boisé, ou au moins, en attendant de sortir sous la pluie crachin, quêter, retrouver et redécouvrir un livre de mes bibliothèques, étagères, piles, quelques cartons encore, de livres.

Sidéré . . .

. . . par les incroyables nouvelles écrites par Hemingway dans sa jeunesse (qui eurent peu de succès). Dont deux purement liée au plaisir d'être dans la nature éloignée des villes et d'y expérimenter son aptitude à s'y adapter hédoniquement en y exerçant ses muscles, son agilité, son doigté méthodique, ses sens. Longues et remarquables descriptions fascinantes, hypnotiques, du ski alpin et de la pêche à la truite.

vendredi 25 octobre 2024

D de diplomates de carrière.

Parmi eux, . . . à tout seigneur . . . avec trompettes et clairons, les Ambassadeurs avec A majuscule au moins sinon blason. Autant de types divers que d'individus. Seule constante relevant semble-t-il de la simple volonté d'avoir voulu être un jour ambassadeur : un orgueil démesuré ayant pour conséquence l'ambition de mettre choses, gens, êtres vivants ou pensants et singulièrement collaborateurs et familiers à sa botte.

Je ne reviendrai pas sur celui qui avait peur des ascenseurs (ou du moins d'y rester enfermé au pire moment) pour une très bonne raison due à sa propre admiration et dévotion pour un très grand Président. 

Rêvait-il à son tour d'être cet homme providentiel que le hasard des nominations avait mis dans un pays alors ami de très longue date, où il exerçait un certain pouvoir et même un pouvoir certain en jouant les négociateurs sur place de l'influence historique et coloniale, pas encore face à la Chine tant que devant les ambitions russes manifestées par la présence de tant de bateaux de pêche (déguisés en) des informations, stationnés devant le port de la capitale et déployant semble-t-il des antennes indiscrètes à des fins d'espionnage des desseins de notre pays sur ce petit coin d'Afrique d'où étaient partis en même temps que des bateaux d'esclaves, des cahiers de doléance pendant la Révolution Française ?

Sa tâche qu'il évaluait urgente et au plus haut de l'importance stratégique, le contraignait à convoquer ses subordonnés certains week-end exceptionnels mais fréquents, hors ambassade, dans sa résidence, avec sur leurs genoux nus (après génuflexion morale, ça va sans dire et en accourant à l'invitation en tenue de bain recommandée, voire obligatoire autour de la piscine), les  lourds dossiers supposés tous brûlants, en cours.

Alors que bien entendu, comme de juste, nous ne faisions tous que mettre en forme et rapporter (c'était le but de ces réunions aboutissant à des dépêches soigneusement cryptées avant d'être transmises, en termes choisis à Paris, ce que nos chefs de cabinets et ministres savaient déjà sans doute par compte rendu direct de certains d'entre nous, voués à court-circuiter la voie officielle par précaution élémentaire et organisation de nos services de renseignements, quand ce n'était par les rumeurs échappés des autre ambassades ou plus simplement les rapports déjà publiés des correspondants de presse, éparpillés dans la capitale.

Ce dernier, non exempt de manies risibles, comme celle de vouloir être sans arrêt, même hors travail, entouré d'un aréopage courtisan prêt à l'écouter, était honorable et sinon admirable presque charmant.

En revanche il en était d'autres bien pires.

Comme celui qui profitait de sa voiture de fonction blindée, aux vitres opaques et pourvue d'un système de communication phonique avec l'extérieur pour haranguer les petites minettes se promenant seules, sans qu'on puisse voir sa figure.

Ou ce premier conseiller qui voyant que le chauffeur n'avait pas pris la voie habituelle, la plus fréquentée, pour regagner son domicile, le fit régresser afin de la parcourir triomphalement tous fanions officiels de son pays au vent, lors d'une absence de son Supérieur qu'il remplaçait très provisoirement. 

Le pire n'est pas là bien sûr.

L'inattendu dans une organisation à l'écoute des moindres bruits du monde en perpétuelle évolution ou ébullition était ce décalage historico-sociologique entre l'extrême importance, il est vrai, d'avoir des écoutes professionnelles exercées aux points stratégiques où se joue il est vrai notre histoire présente, et cette caricature, cette parodie, cette pantalonnade à laquelle se livraient parfois, des protagonistes d'opérette légère, imitant de façon grotesque la hiérarchie médiévale avec toutes ses cascades de cérémonies et d'apparat d'une époque où l'ambassadeur envoyé en mission par le souverain lui-même devait lui rendre compte directement de ses informations qu'il avait captées et des manœuvres habiles et souvent perfides qu'il avait personnellement pu mettre en branle. 

jeudi 24 octobre 2024

IA exécrable et honnie.

Encore beaucoup (après tant d'analyses et de discours écrits, lus, déclamés déjà) de craintes exprimées au sujet des risques de déshumanisation qu'entraînerait l'exécrable et honnie Intelligence artificielle.

Personnellement je suis assez naïf pour penser que ça n'a rien de vraiment nouveau, il y a fort longtemps qu'on a tenté de nous enfermer dans des calculs, recensements, enquêtes, graphiques, courbes, statistiques, études prévisionnelles, classifications et classements en catégories, types et figures . . . J'ai toujours eu un faible pour les études anthropologiques de Cesare Lombroso sur les criminels nés ! Que d'argent on aurait pu éviter de dépenser en police, justice, prisons et châtiments si on l'avait écouté !

Il y a déjà longtemps que gouverner, prévoir, vendre des marchandises, berner, circonvenir, exploiter, enrôler, enrégimenter, maîtriser les flux, influencer et persuader est tout un, tout un art unique, celui de faire entrer l'énorme flot des vies humaines individuelles et disparates dans des conduits, moules, cases, courants, et mieux encore machines, labyrinthes, trucs à trier et machines à laminer.

On peut aussi se dire, si on est vraiment optimiste et sereinement confiant que tous ces calculs que fait la machine pour moi (elle travaille bien pour quelqu'un)  c'est autant d'économisé sur mon temps de pure expression, divagation, jouissance, extraversion ou introversion, propres ambitions, manifestation de mes réticences, actes constructeurs, égoïstes ou altruistes et dilapidation de mes possibles et de mes choix réels après examen échappant partiellement au moins par pouvoir et moyens, si je m'en empare, de dire non aux pures filières de la nécessité et du déterminisme de mes cellules, de mes gènes, de mes affects, de mes influences familiales, de mes dressages éducatifs et de mes orientations pré-télé-guidées et des vraiment eux/elles à honnir, influenceurs-ceuses. 

Tiens par exemple, on ne va pas me croire, je rêve maintenant 

que je ne peux plus conduire à mon gré sur une autoroute presque vide, et que je dois filer en paquets accolés, en anneaux de serpent, resserré entre tous les véhicules à la queue leu leu sur la voie de gauche, les camions occupant entièrement, mur mortel, celle de droite, au risque permanent d'un accrochage irrémédiable et fatal par légère déviation ou d'un enfoncement total et encastrement de tôles et d'acier par freinage brutal et mauvaise évaluation de l'un des partenaires de ce jeu reposant sur l'extrême attention et l'impeccable réflexe de chacun d'entre eux, 

d'une voiture, confort suprême,  auto-pilotée.

Après tout . . .  le monde est déjà tellement balisé, sécurisé, pré-moulu-maché, surpressé, pressurisé, climatisé et endoctriné que . . . . et oui ! ça n'a pas pourtant jusqu'à nouvel ordre empêché qu'il soit imprévisible et échappe à toute exposition universelle nous vendant, nous ventant, notre futur. Y compris en suscitant de par son propre cours régulé mais instable et indocile d'énormes cataclysmes imprévus qui nous laissent pantois.

mardi 22 octobre 2024

Livres (murs d'enceinte de).

 Je me souviens de ce très gros et lourd et très ancien livre, qui remonte à Raymond VII, était-ce à Cordes-sur-ciel, ce libre ferrat ? où s'arrêtèrent un instant tant de gens de passage, dont Albert Camus qui la goûta au point d'écrire sur lui, la perfection du site, qui était attaché par une chaîne à gros maillons, de peur qu'un indélicat aille s'emparer de ces précieux parchemins aux sujets et registres divers, qui au moyen âge, encore mis à disposition des lecteurs, attaché donc par une énorme chaîne à un pilier sous la halle publique de la ville et qui aujourd'hui, en plus légères techniques ultra sophistiquées, a été reproduit pour le musée des Augustins de Toulouse.

Emporter un livre est devenu un acte quotidien léger. Poche, valise, sac, au bout des doigts sans entrave. L'emprunter, le prêter, l'acheter, l'offrir, le voler, le perdre, le brûler, le déchirer, le corner, le tacher, le laisser tomber dans la mer, l'oublier sur une île. Le livre vole au loin de ses propres ailes comme un oiseau depuis surtout qu'on en a supprimé ferrures, reliure et couverture lourdes, cousues, emboîtées pour en faire de si légers livrets brochés.

Le problème ne commence qu'avec le rangement, les étagères et les bibliothèques.

Cette petite machine primitive, cerveau, yeux, doigts, tourner les pages et revenir en arrière s'il le faut, ou aller voir au bout si l'on veut tricher, simple et commode, à moins d'être numérisée et dématérialisée, est hyper fragile et très lourde finalement quand elle forme des bancs ou des vols entiers d'êtres contenant la vie (oeuvres d'une et racontant) extérieurement proches en apparence, mais bagués identifiés, titre, auteur, date, totalement individualisés.

Comment les mettre en cage, en cartons, en tas, en piles, en containers ?

En collections et prolifération de rangées, la croissance de la bibliothèque, pierre à pierre, brique à brique, bloc à bloc, s'arrange à former des murs où il est possible, mille signes gravés, interprétés, parois d'argile enfoncée de clous, comme dans un labyrinthe familier de s'enfermer pour chercher l'issue, la clef du mystère, la sortie du jeu.

Alors de deux choses l'une, ou le livre enferme et sert à se cacher en sa tanière forteresse, à se laisser dévorer . . . ou il sert à s'évader, hors du livre y compris.

Les deux mon capitaine. Bien que je sois du genre à fuir sans cesse l'enfermement.


H O B .

 H O B , ses initiales perdues dans un glacis de peinture par endroit vaporeux, comme un nuage suspendu sur les hauteurs abstraites mais si proches de notre ciel. 

Hugo Orellana Bonilla.

Il avait utilisé ce grand tableau comme affiche ou signal d'entrée de la galerie dans la cour de l'Alliance de Miraflores à Lima. Il était descendu de ses montagnes à plus de 3.000 mètres et nous lui faisions une rétrospective sur l'initiative d'un de ses amis français connaisseur inspiré du Pérou. Dans la galerie elle-même on avançait entre des assemblages de couleurs rares, des rencontres bizarres de textures, fortes ou légères, de nuances vives ou éthérées, en nappes comme des sons. Peu à peu on devenait sensible à cette quête, à cette écoute de l'insaisissable et à ces chocs de sensations. Pas étonnant il avait passé une partie de sa vie après son parcours initiatique de formation qu'on pouvait dire classique : Lima, Mexico, Florence, Paris, à recueillir les musiques andines de sa région native, Jauja, première capitale du Pérou imposée par Pizarro en 1534.

Quand je regarde cette toile suspendue assez haut, au-dessus de ces petites peintures sur planche anonymes de San Francisco et de Santa Rosa de Lima nourrissant des oiseaux, je vois son dos légèrement vouté, son regard modeste tourné vers les cimes et son extrême gentillesse.

lundi 21 octobre 2024

Figa.

La figue comme signe.

Un bout de pouce apparaît entre index et majeur.

On peut prendre l'ensemble comme représentation gestuelle symbolique du sexe féminin et lui adjoindre une bras d'honneur pour faire bonne mesure ou en faire, introduction du pénis dans le vagin, une représentation de l'acte sexuel entier et on peut alors lui faire dire, par métaphore hardie et par antiphrase ou litote, ce qu'on veut, insulte, simple et forte négation, protection contre le mauvais œil, geste porte bonheur, selon la culture dans laquelle se situe ce geste de la main, grecque ou latine ou étrusque, jusqu'à l'asiatique, japonaise, coréenne, en passant par l'Inde et le champ balkanique où il est marque d'opposition.

Au Brésil sans équivoque, transmis par l'héritage colonial portugais, on en a fait un geste apotropaïque banal : on fait porter en breloque ou pendentif une figa au bébé pour le protéger contre les menaces qui planent sur lui. Plus tard, l'adulte brésilien ou le touriste de passage aura mille occasions de s'en procurer une pour affronter les moments difficiles de sa vie d'autant que cette main pourra très bien faire bonne figure, si l'on peut dire, accolée en pendentif au pé de moleque, ce pied d'esclave fugitif coupé, devenu, là aussi, par antiphrase et  retournement, comme si c'était un gentil pied d'enfant - mais c'est aussi le nom d'un gâteau ! -  porte bonheur.

Il se trouve donc que j'ai retrouvé ces jours-ci une petite et longue figa . . . crue perdue depuis un temps lointain. Une figa en tourmaline noire, au bras long.

Elle véhicule, objet mémoire, une histoire de dispute intime (celles dont on ne parle plus jamais, encore moins ici) dans mon jeune couple expatrié au Brésil. Un Brésil inoubliable qui nous a semblé dans sa cruauté et sa vitalité, dans notre découverte de l'ailleurs du monde, le paradis. Violente dispute. Jetée par terre elle s'est cassée. Réparée depuis des lustres, recollée, enjolivée d'un bracelet d'or minuscule et ajouré elle en dit long sur les retournements. 

Vu la longueur et la durée, je crois qu'il faut y croire.


vendredi 18 octobre 2024

(que faisait) Dio Darko Brac ?


Vous me direz : mais que faisait exactement Dio Darko Brac ?

Je vous répondrai : difficile à dire.

Quand je l'ai rencontré il avait déjà été, par une série de circonstances étonnantes, conseiller spécial, ce qui veut dire beaucoup sans qu'on sache très bien quoi, de ce nouveau Président adoubé par des élections qui avaient fortement mécontenté la moitié de la France ou presque et qui avait inversement rendu la foi en la politique, peut-être avec une composante de naïveté bien propre aux militants qu'on appelait encore à l'époque "progressistes" , soutenus par l'autre moitié, et un peu plus, des électeurs de notre beau pays.

Si je vous en parle c'est bien pour rappeler sa présence constante dans ma vie. 

Le récit de ses "aventures", de ses tribulations incessantes que j'avais pu consigner, rapporter et mettre au clair, me servant des notes rapides qu'il m'envoyait constamment, occupaient un flot de pages que j'avais provisoirement scindées en trois parties, presque, vu l'épaisseur des feuillets et cahiers accumulés, en trois tomes. Pour m'y retrouver j'avais trouvé trois titres provisoires : 1 -  le messager cannibale,  2 - beauté fractale et enfin le troisième, pas le plus mince, ses dernières enquêtes et pérégrinations s'étaient multipliées : 3 - rien ne va plus (et peut-être un tout dernier, sait-on jamais, mais cela dépend de tellement d'impondérables : 4 - vestiges, vertiges).

[Parenthèse juridique : ces titre de manuscrits déjà écrits ont été déposés avec les feuillets tapuscrits correspondants auprès de la société des auteurs en puissance, la fameuse et peu connue S.A.P.]

Et surtout, qu'était-il devenu entre temps, lui le protagoniste sans arrêt menacé ?

jeudi 17 octobre 2024

Lares, Pénates, Mânes.

Si j'ai pu transporter mes pénates auprès de divers lares c'est que j'avais sans doute de bons mânes

et que ces dieux domestiques, celui, celle ou ceux de mon foyer et de mon garde manger (donc transportables), celui, celle ou ceux des lieux que j'ai hantés (dieux inconnus qui m'ont accueilli), celui de mes ancêtres et de leurs dieux protecteurs, généralement un couple tutélaire, se sont un jour mis d'accord après m'avoir expédié du Sud, 

à l'Ouest 

                                                         puis au Centre de la France, 

                                                                                                                              explorer au-delà, 

le Sud de l'Amérique 

puis l'Ouest de l'Afrique,

                                                             puis son Centre et enfin, avant de revenir chez les Celtes                                                                                                                                                      romanisés du Sud, 

au Nord-Ouest de la Sud-Amérique.

Ils m'ont refusé l'extrême                                                                                            Est de l'Afrique (Madagascar) où j'aurais bien aimé aller, ainsi que ce monde fabuleux du 

Sud asiatique (l'Inde) que j'aurais tant aimé explorer un tant soit peu même si l'établissement de relations de travail y sont pour nous, francophones et Français de France, un peu difficiles, on m'en avait prévenu.

             Ainsi suis-je hémiplégique du monde. 

C'est sans doute ce que les dieux, ces dieux modestes, attachés à nos petites vies,

y compris mes ancêtres, dont l'un peut-être, du côté de ma grand-mère maternelle, oncle lointain, missionnaire ou militaire ou marchand ou autre ? quelle raison eut-il de partir ? Aventurier ? mythique et ni définitivement revenu ni retrouvé aurait vécu en Afrique (c'est vague . . . ) et sur le continent sud de l'Amérique, ayant eu l'occasion de fréquenter . . .  certains peuples dits aujourd'hui premiers, (je garde quelques vestiges rescapés de ces voyages inconnus de nous et rapportés lors de l'un de ses deniers et très rares retours, mais ces vestiges sont à la fois peu nombreux et non identifiables pour une localisation précise, et en partie égarés . . . . l'un d'eux constitué de sandales de cuir dont je me souviens à peine avait disparu de mon héritage lors de mon propre retour de l'étranger, jetées . . . . sans doute, détériorées et rongées parles rats) 

ont voulu semble-t-il. 

Je n'ai pu faire personnellement que de rapides incursions et survols surtout théoriques, livresques, cinématographiques, oniriques, dans ce lobe oriental qui donc m'échappe comme expérience et m'intrigue aujourd'hui d'autant plus; 

curieusement je ne le regrette pas vraiment. 

Me reste un hémisphère (presque) totalement (voué à l') imaginaire.


mercredi 16 octobre 2024

Chef.

Etre chef est impossible.

Il faudrait pour y arriver mobiliser toutes les qualités du monde. Une autorité ne pourrait être justifiée ou acceptable que par une concentration de compétences humblement humaines allant de la plus lucide conscience omnisciente aux pratiques les plus bienveillantes, désintéressées et avisées de l'action humanitaire.

Or en général l'autorité du chef ou du sous-chef ne s'impose que par décision et action péremptoires sans vrai raison qu'égoïste, à courte vue ou, dans le meilleur des cas, calculatrice mais bornée, et née de la précipitation voluptueuse à trancher, imposer, dominer.

Le chef devrait toujours se mettre à la place de l'autre, or peu de gens ont ce pouvoir majeur de clairvoyance et d'empathie.

J'avoue qu'ayant horreur d'être dominé parfois par des incapables ou/et malveillants, j'ai voulu être chef dans mon espace propre.

J'avoue n'avoir jamais réussi ni essayé vraiment d'y arriver sans tomber dans l'un des travers de presque tout chef : être sensible aux louanges, trancher malgré les gants que je croyais porter, trop brutalement, être trop sensible aux inimitiés, incompatibilités, hostilités, ou, plus grave donner l'impression par hâte, désir de prendre le contre-pied, illusion de pouvoir ouvrir une voie,  ou peut-être mépris sous entendu, finalement par orgueil, que j'agissais par caprice inexplicable.

O (de certains ) Objets (culte des).

Mon fétichisme ne se manifeste pas (rempart, forteresse de la mémoire disloquée ?) dans mes archives que . . . même si principalement avec quelques objets ethnologiques dont j'ai été collectionneur occasionnel, dans les livres 

accumulés par sections et périodes, y compris, 

revues telles, rares résidus de toute une époque littéraire post-soixante-huitarde (peut-être consécutive et induite effectivement, par "transfert de champ" ! . . . ): exemplaires sauvés du feu, de l'humidité, de la moisissure, de déplacements et stockages multiples . . . de Tel Quel ou Change, à gramma sur Bataille (automne 1974), Promesse (printemps 71), Poétique (même année), Digraphe (76) avec des textes de Roland Barthes ou de Pierre Guyotat (quelle époque ! moi qui suis pourtant si peu nostalgique . . . ), 

parallèlement ou plus tard toutes sortes de documents sur les arts plastiques dont subsistent, rescapées de tris arbitraires et forcés, quelques Art Press du temps de Catherine Millet . . .  

. . . une armoire ou presque de guides touristiques, dictionnaires bilingues, certes . . .

ou  comme objets devenus sinon intouchables, du moins sacrés, que j'ai maintenant la charge de conserver intacts, sur mes étagères si difficiles à dépoussiérer . . .  

objets de divination africains, petites sculptures minimalistes manifestement chargées de pouvoirs,

et ces terribles huacos, poteries péruviennes archaïques, à la fois cruches à eau et instruments de musique sifflant sur plusieurs notes, retrouvés dans des huacas,  à côté de grelots en forme de tête de chouette et de bijoux de pierres en colliers, dans les tombes de sable du désert côtier, accompagnant des morts dans ces cimetières, dont ne restaient que des crânes et parfois, des bouts de mèches brunes résistantes et des tissus de suaires ornés de pélicans ou de perroquets . . . . . . .

. . . . . . . . / . . . .   Car il peut avoir lieu partout ce fétichisme. En n'importe quel objet qui du coup en devient, malgré lui et par détournement, symbolique. 

Ainsi à côté de cette série de livres aujourd'hui introuvables, parfois en éditions locales, sur les oiseaux des pays où j'ai pu vivre, mais dont je n'ai pu le plus souvent percevoir que certains et parfois seulement par leur chant ou par quelques éclairs de plumages de loin, en réalité, souvent, pas à côté, pas tout prêt, hypnotisé de cette beauté fugace, ni comme filmés dans les documentaires animaliers qui sont aujourd'hui mon pain quotidien, et . . .

. . . dans une autre armoire, ces livres vieux trouvés ou récupérées à droite et à gauche, éditions de certaines livraisons oubliées où se manifestaient les plus grandes superstitions exploitées en librairie ou vitrine de gare, au sujet des pyramides ou des lignes de Nazca (les vraies et mystérieuses lignes du désert), y compris cette magnifique supercherie virée au carambouillage grotesque organisé par un chirurgien ayant fait fabriquer des galets gravés pré-incaïques pour son fallacieux pseudo-musée personnel sur place . . . (nos élucubrations archéologiques ne sont-elles pas parfois tout aussi faramineusement incongrues et mensongères ? songez au temps qu'il a fallu pour comprendre que les restes d'animaux découverts immergés dans des mers de glace ne relevaient pas, dans la préhistoire nordique, d'un quelconque culte fait de sacrifices animaliers mais d'un comportement humain anticipant sur nos réfrigérateurs.)

Ainsi je garde aussi, punaisée à une porte de meuble, la lettre courtelinesque de réponse administrative envoyée à mon beau-père pêcheur de sandres et brochets devant l'Eternel, qui s'était plaint en haut lieu d'une restriction de cette pratique à la suite de la modification d'une digue dans un certain lieu de rencontre entre deux cours d'eau (le Tarn et la Garonne). 

Peut-être parce que pour moi (qui ne suis ni pêcheur ni chasseur et qui n'ai jamais pris au sérieux un dixième de nos actes et coutumes bureaucratiques) ces lieux de rencontre et d'eaux mêlées ont une toute autre signification intime et secrète.

Ainsi j'y tiens beaucoup et j'ai accroché dans la fameuse cabane de jardin dont le toit rénové et fait d'un matériau nouveau qui prend légèrement l'eau, ah progrès incessant des fondamentaux ! un archaïque râteau fait . . . 

Sans parler de ces couteaux pliants portatifs, anonymes et usés,  mais de (chefs de) famille à n'en pas douter qui de temps à autres me servent à couper des pages . . .

J'utilise souvent, objet encore plus trivial . . . cette pierre à aiguiser de faucheur . . .

On le voit, ancien nomade je vis en quelques lieux . . . je vis . . . sauf ici . . . parfois, ou justement d'autant plus enraciné ici maintenant, un peu partout et ailleurs, entouré de marquages et de bornes parfois illisibles.

mardi 15 octobre 2024

Liste.

Voici les prochains mots ! :

Vaisselle (tant de).

Chef(s) multiples et déjoués ou pas . . .

Livres (l'importance des et leur place dans les impedimenta ou les pénates transportables ou pas).

Lares (dieux).

Lieux (encore . . . . et de leur importance dans la complexion interne).

O (de certains) Objets (culte des).

mardi 8 octobre 2024

I (d'une apparente) [I] - rrationalité.

De plus en plus me frappe la réapparition flagrante, la manifestation puissante et inattendue de l'irrationalité et face à elle semble-t-il, en véritable face à face, une terrible et fautive i - rrationalité.

Dans cette absurde, avalanche totalement incohérente, poussée loin jusqu'à l'extravagance  - / de nature on dirait démente / -  d'événements calamiteux, expansion des peuples squelettiques, affamés dés leur naissance dans un monde riche à profusion, boursoufflé et rendu malade par la trop-bouffe ou la mal-bouffe, guerres menaçant les partenaires commerciaux de destruction massive dans un monde de traités de paix échafaudés à grands frais d'ambassades, de colloques, de réunions mondiales, de nations unies, surgissement d'épidémies, d'hécatombes, de fléaux naturels provoqués par notre développement, notre exportation et universalisation du progrès technique, démantèlement et réduction à l'impuissance de toute protection contre une délinquance généralisée et le surgissement de bandes armées organisées . . . . . . explosion de la vente et de l'usage de stupéfiants, etc . . . etc . . .  la propension notre, immergés que nous sommes dans l'obscurité, à édifier face à l'insaisissable, l'inconnu, l'imprévisible, les formes monstrueuses que prend parfois le réel, précisément une pré-vision, une capacité d'anticipation permettant ou plutôt supposant nous permettre d'accéder à la maîtrise de ce réel en train de naître, un réel à venir qui a pu, il y a peu encore, être chargé de tous nos espoirs, me semble constituer une autre, une nouvelle irrationalité ou pour mieux dire : une I - RRationalité... [je ne m'y risque pas, mais il faudrait être Dali pour prononcer ce mot connu mais qui, ainsi dit, devient autre].

Comme si le réel n'était que ce petit jardin que nous avons cru discipliner, tailler, semer de nos chimères, réduire à ces perspectives sagement dessinées, à cet art topiaire, géométrie amusante, allées tranquilles, ondulantes bordées de haies, qui nous réjouirait, alors que nous le savons bien il est de fait constitué, ce jardin qui pousse et nous échappe, de plants voués à l'incertain. 

Encore ai-je bridé dans cette description l'envie de parler des monstres qui sans doute le hantent.

Il est vrai que ce réel qui pourtant maintes fois a prouvé qu'il ne nous appartient pas plus que l'avenir (ô litote et langue de bois bien pensante, rêve géopolitique, vœux pieux, morale flottante, hésitante et  radotante, illusion onusienne !) semblerait presque sinon nous appartenir, du moins dépendre de nous de plus en plus. "Nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature" disait le cavalier divin géomètre. Nous nous sommes tellement immiscés dans son fonctionnement . . . au point peut être d'en arriver à provoquer nos propres maladies, disfonctionnements et dégénérescences, au point de nous apercevoir par exemple et un peu tard que nous étions en train depuis deux siècles de modifier le climat de notre unique socle, nid, niche, minuscule portion d'univers, ce petit territoire sphérique en forme de bille infinitésimale (cependant assez étendu pour nous) qui nous est refuge, notre très chère, très belle, très variée et pourtant très limitée en espace petite planète.

C'est peut-être qu'à la racine de nos erreurs (dites-moi là où ça a foiré, où c'est parti en vrille . . . ?) ne se trouve pas seulement 

l'incroyable "demi savoir", fraction infime de savoir mal relié et digéré ou interprété, le plus souvent remplacé par le vide de la parfaite ignorance à laquelle nous sommes voués sur presque toutes les questions, ignorance ou demi-savoir répandus dans presque tout nos ensembles de peuples pourtant "évolués", "civilisés", c'est à dire d'abord nantis d'un confort minimum et scolarisés, foules ayant au moins approché les trésors des recherches traditionnelles ou scientifiques et l'idée d'un monde organisé plus ou moins inspiré de l'idée fort ancienne et inatteignables de démocratie, 

. . . sans compter donc sur, sans en parler, puisque nous la tenons pour rien, cette gigantesques masse ayant néanmoins figure humaine, encore tenue à l'écart sur ses (possessif provisoire) territoires convoités par notre astucieuse industrie , groupes relevant au moins partiellement d'une culture dite sauvage, primitive ou première, masse à peine effleurée par cette transmission, poussées aujourd'hui et depuis belle lurette, à gagner les banlieues de mégalopoles où elle est reléguée, réfugiée et attirée, poussée par la faim, dans une acculturation effroyable, pis encore, vouée à l'extinction . . . 

sans parler de ces camps où sont réfugiés, exclus de tout accès au minimum vital sans parler de savoir, de culture, de mémoire, de la moindre dignité, les expulsés par nos guerres économiques, partis de chez eux sans bagages . . . mais . . .

se trouve aussi, surtout sans doute, l'illusion elle-même,  la confusion, l'erreur fondamentale sur laquelle reposent toutes ces connaissances encyclopédiques et toutes ces pratiques homologuées par la répétition et l'usage, notre orgueilleux savoir porteur de civilisation, de colonisation et d'esclavage . . .

Car . . . sur quoi se fondent les tentatives de compréhension globale ou fragmentaire telles que nous les proposent l'observation, la logique, la réflexion, la science et l'industrie occidentales, stratification énorme et contradictoire des couches de savoir et de techniques que l'Occident d'abord et le monde entier ensuite ont prétendu augmenter et transmettre et imposer  à l'univers ?

On peut avoir certains jours envie de balancer par dessus les moulins tout Hegel (Principes de la Philosophie du Droit : "Tout ce qui est rationnel est réel et tout ce qui est réel est rationnel"), et, en remontant plus haut, tout Descartes et tout Spinoza et son "tout est intelligible de part en part", bref toute philosophie fondatrice de la science comme approche ou construction de l'intelligibilité totale et de la la rationalité absolue. propension de ces hommes du passé sur les épaules desquels nous voilà encore aujourd'hui juchés, à s'ériger en substitut de ce Dieu un et infini qu'ils ont eux-mêmes tenté d'approcher ou d'imaginer ou en l'occurrence d'imiter comme image révélée ou construite.

Combien parmi nous et nos prévisionnistes informés, forts de ces atouts, riches de ces garanties accumulées d'avancées en découvertes, gonflés de données calculées, chaque jours précisées, ont pu se prémunir contre et anticiper - pour évoquer un domaine échappant aux limites nationales et les débordant, relevant de la physique, science depuis longtemps la plus avancée - les grands désordres climatiques, pourtant prévus par quelques rares esprits inspirés ? Avons-nous, ont-ils vu qu'ils allaient nous tomber sur l'échine ? S'ils l'ont vu qu'ont-ils fait ?

Encore parmi les surprises de l'i - rrationnalité (forme de folie seconde, ajoutée à notre naturelle folie, au prétexte de la brider) à l'oeuvre, me garderai-je  bien d'évoquer les discours officiels nous abreuvant de la vision d'une Europe ayant éliminé la guerre de son territoire, aux frontières agrandies et reformées où l'on devait mieux respirer, ou encore, du droit que s'arrogent maintenant sans limite certains peuples jadis et encore persécutés et massacrés de se transformer, pour prétendre établir leur vie collective en sécurité, en persécuteurs. 

 

dimanche 6 octobre 2024

Poire et fromage (entre la et le).

 . . . .  ((ces points signifient qu'il y aurait tant d'autres choses à dire et que cet échantillon d'illustration et de commentaire (hors essai de définition)) n'en donne qu'un aperçu restreint) cette expression populaire et chérie de quelques écrivains dont Balzac, au sens flottant, un peu incertain, soit pour dire impromptu, inopinément, renvoie aussi à ces repas copieux de nos ancêtres où vers la fin du repas la conversation pouvait devenir, et parfois incidemment, plus libre ou plus sérieuse, ou plus inattendue bien que peut-être espérée et provoquée, fonctionnant en révélation glissée entre amis, entre soi, comme un secret, or ici c'est exactement ce que je veux faire :

un restaurant fameux où nous avions pris tout simplement la formule la plus abordable servait en léger  hors d'oeuvre une non moins fameuse recette : demi poire enduite de sauce au roquefort ! fichtre, parlons-en, c'est le moment opportun, quel accord, quelle amitié entre le fromage et le fruit en ce cas précis réussi !

l'expression qui peut donc paraître incongrue pourrait aussi révéler, donc, bien d'autres richesses y compris . . . gastronomiques qu'il n'y paraît . . .

. . . mais ne nous en tenons pas là, à cette occasion de fin de repas évoqué sinon servi, hommage soit rendu à ma mère qui réinventa cette autre tradition de gourmet gourmand : la confiture extraordinaire faite de poire, raisin, coing, plus éventuellement amande grillée, un délice inoubliable !

Pointillé (vie en . . . )

Oui ça m'avait choqué qu'on me parle de "ma vie en pointillé".

Je n'avais pas du tout cette impression.

Ma vie avait été variée et un tant soit peu chaotique mais pas plus que ça et avait surtout été une et unifiée, continument affirmée telle, sans autres bifurcations que consubstantielles à toute vie et certes quelques accros mais assez dans les normes, c'était mon impression globale. J'avais même (ce que je trouvais évident au vu de l'intérieur) assumé une belle continuité depuis l'âge de dix-sept ans où j'avais tout bravement décidé, avec orgueil et sans hésiter, d'être prof de philo comme tremplin pour voir ce que de là on pouvait y faire, d'abord sur place et concrètement et ensuite, par delà . . . envisager, assumer, imaginer, rencontrer au hasard des mouvements et recherches, quitte à se heurter à des impossibilités, comme autre carrière à explorer avec plus ou moins de doigté et de bonheur.  Ainsi je n'avais en même temps, réellement simultanément,  cessé d'explorer les voies parallèles du militantisme politique (difficile et aveugle engagement), de l'esthétique comme discipline philosophique (j'aurais dû continuer), de la littérature contemporaine (possible mais moins attrayant pour moi), de la publicité (gros choc des contraires à mon appétence et difficile de ne faire qu'espionner), du droit (amusant mais incompatible), d'une incursion théorique (s'y plonger m'aurait traumatisé) dans la psychanalyse, du travail bénévole de journaliste (beaucoup de plaisir et d'amitiés) et quelques autres; mais tout cela relevait en clair pour moi de la même recherche d'expériences et d'explorations pour voir.

Oui . . .  dans de nombreux lieux ça oui, incontestablement hachurée en déplacements, nominations, engagements, déménagements, réadaptations et rebonds après souvent être allé trop loin dans mes engagements ou mes désirs, j'ai toujours manqué de souplesse. 

Un jour je vais compter les villes et villages où j'ai vécu et dont et où j'ai dû déménager. Une trentaine si je compte tout, en ne comptant que des séjours d'au moins un ou deux ans de durée et y compris mes quatre séjours de travail dans des pays étrangers et mes installations personnelles hors frontières. Mais tout cela est un. Je ne me suis en passant par là ni disloqué ni démembré tout au plus au contraire renforcé dans mes convictions premières. 

Ainsi dirai-je plutôt qu' "en pointillé", ma vie :  en tête de pioche chercheuse.

C'est vrai je n'y peux rien, j'ai de la haine pour les retournements de veste et les arrivistes sans convictions. [Le seul Président de la France que j'ai à ce point détesté était Sarkozy.] A un moindre degré, je supporte mal les tièdes et les pleutres.

Horreur et putréfaction, je honnis et décapite les traîtres.

samedi 5 octobre 2024

Identification.

 Un jour (je vous ai peut-être déjà raconté ça mais je ne crois pas, en tous cas pas sous cette forme) je rentrais à Paris où j'allais plaider une cause qui me paraissait essentielle à ce moment là dans notre coopération culturelle avec le Congo alors Zaïre, venant de Kinshasa sur un vol UTA (la compagnie qui n'existe plus) vol arrivant d'Afrique du Sud (pays où je n'ai jamais voulu mettre les pieds) et je me trouvais à côté d'un très grand noir très chic en costume gris, d'origine camerounaises bamiléké vivant à Johannesburg, négociant en pierres précieuses, me racontait-il et il était assez bavard. 

Bien avant d'atterrir il m'avoua que je pourrais lui rendre un grand service si je remplissais sa fiche pour la douane à l'arrivée et il me tendit son passeport.

Il avait de très bons yeux même sans loupe, voyageait sans problèmes dans le monde entier, spécialement au Botswana mais pas seulement, aussi de Prétoria à Amsterdam ou Anvers, parfois à Tel Aviv mais ne savait ni lire ni écrire. J'ai d'abord cru que c'était une blague. Il m'a assuré que non. Je lui dis que je le trouvais plus intéressant à écouter que beaucoup de grands lettrés que j'avais pu approcher. Il rit et insista brandissant sa fiche que bien sûr je remplis avec application en recopiant des données que j'ai maintenant totalement oubliées. Je me souviens juste qu'il était un tout petit peu plus vieux que moi et j'avais alors moins de quarante ans.

Donc, ce qui m'apparait aujourd'hui c'est qu'il était alors exactement mon homologue, ou du moins puis-je m'identifier à lui, quand je voyage maintenant partout peut-être un peu inconsidérément mais avec beaucoup d'intérêt sur le Grand Net, complètement ignorant du moindre protocole de fonctionnement, du vocabulaire correspondant aux divers organes et diverses opérations qu'on peut y négocier quand on sait remplir correctement ses fiches de douanes digitales.

vendredi 4 octobre 2024

Mystères insondables.

Après être passé par l'Irlande et Hong Kong, mon blog  analphabiographique et abiocédaire n'a plus de lecteurs qu'à SINGAPOUR. Que s'est-il passé ? Que se passe-t-il ?