mardi 15 mai 2018

Voyage, exil volontaire.

Rien n'égalera jamais cette première impression qui assaille l'expatrié propulsé volontaire en terre étrangère; parfum, lumière, suffocation des sons, couleurs et harmonies jamais vues, arrachement et précipitation dans ce territoire-monde où objet étranger, rapporté, proie des regards, il est jeté et par là même enregistre tout définitivement, gravé, enfoncé, inchangé.
Quand j'accueillais quelqu'un à l'aéroport, revanche, curiosité, constat sur le semblable mon frère, je surveillais de près ce réveil du passager débarqué, tout à fait jeté-là, nouvelle naissance, descendu du tapis où il a mal ou rien dormi, parfois entrecoupé d'escale ou remontant du temps raccourci, allongé, à n'y rien comprendre, livré là, aux mains d'un inconnu.
Ainsi pourrai-je égrainer mes affects de nouveau débarqué :
Lima le gris poussière de volcan, lumière de crépuscule éteint, trajet interminable dans un véhicule flottant comme une barque au long d'un quartier mort, étendu en hangars abandonnés sans fin, arrivée enfin sur une avenue de Miraflores, avenue où je retrouvais quelque chose en plus triste des lanchonetes, bar, modestes du Brésil que j'avais connus avant, bien avant.
Kinshasa, cette impression d'avoir été expulsé du froid de l'avion dans un four humide, un ventre, un sexe de corps en sueur et de découvrir ces visages bien plus fermés, misère, guerre, après le, à l'époque, vivant et souriant, moqueur face au blanc, Sénégal.
Non, ne pas continuer.
C'est trop fort et je le garde en moi pour d'autres pays où je suis passé plus vite.
Si, encore, Bogota, quelque chose de magnifique, malgré la guerre absolue de la drogue, de l'armée et des gangs quand j'y étais, cette modernité, ces montagnes trouant la jungle, cet air d'une autre planète futuriste et ce fatalisme des gens bien décidés à vivre, à fêter la vie en dépit de tout.

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