vendredi 15 janvier 2021

Vent.


Ici c'est triple ou quadruple. Mistral, Tramontane, Marin et vent d'Ouest ou d'Océan lointain qui arrive parfois et porte, à touts coups sans obstacles, la pluie, et parfois aussi un cinquième, le Grec ou vent d'Italie qui souffle si souvent en été, dans l'après-midi, humide, frais, près de le Méditerranée. Quand j'étais gamin je me souviens des fous qui hurlaient presque au centre ville, pas très loin de l'école primaire publique, dans l'asile privé du Bon Sauveur quand c'était vent d'Autan, c'est à dire ce même marin qui va bien au-delà dans les terres, bien loin de la côte, et arrive tiède, haletant comme une bête, se faufilant plus ou moins dans les vallées et les seuils en reprenant du poil.

Mais j'aime le vent surtout en frontière de Catalogne où il est terriblement fort et tellement parfois que Maillol, Aristide le sculpteur, disait qu'il était impossible de ne pas croire en Dieu quand il soufflait sur son mas à flanc de pente tournée à rebours de la mer et qu'il était impossible de résister. Personnellement, ça ne me fait rien de tel, ni croire, mais bien sentir les forces enfouies dans la terre et leur déchaînement possible, outrepassant encore, toujours, nos prévisions, récupérations, canalisations, détournements, faibles usages.

Le vent au bout d'une longue marche solitaire remet en place le cerveau coincé dans des crispations de doigts et logé dans des images illuminées par derrière, sur écran et clavier de ces barrières que construisent nos ordinateurs de bureau, de poche et d'ankylose, déformant nos joints et emboîtements de vertèbres, créant des circulations et des courts circuits merveilleusement inattendus en nous, mais . . .  si peu compatibles avec l'affrontement direct du monde "extérieur", avec la préparation du combat corps à corps que créaient encore la caméra au poing ou la scène projetée et filmée en extérieur, même en travelling, ou la parole proférée du conteur de cheminée ou d'arbre à palabre, ou le récit imprimé qu'on pouvait lire en pose à ciel ouvert.

Le vent fou est l'antidote de la vie close et refermée, foutraque, sur nos miroirs et abaques.

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