Un peu découragé par la tournure des événements je me dis que j'ai tort. Ce n'est jamais ce qu'on a prévu qui arrive, ni individuellement ni collectivement. C'est toujours un peu à côté ou carrément à l'envers, ou en tout cas inattendu car personne ne "remplit les cases" des cahiers de charges des planificateurs ou des prévisionnistes, ces cahiers étant eux-mêmes faussés, limités, rendus aveugles par le spectre toujours trop étroit des cas de figure et hypothèses subséquentes qu'ils embrassent.
Ainsi nous avions prévu une Europe sans guerre et progressant vers un humanisme de plus en plus respectueux de la nature, en définitive une Europe exemplaire face à un mode à remodeler [n'était-ce pas là encore un effet, une prolongation linéaire édulcorée, de nos passés coloniaux d'êtres supposés porteurs de civilisations supérieures ?].
Diable pourtant, comment n'avions nous pas vu venir dans nos propres rangs et réserves ces tornades d'oeuvres, ces bataillons d'artistes qui imaginaient et montraient les cataclysmes qui nous affligent ? les monstres engendrés par nos systèmes ? les hécatombes et destructions qui se préparaient dans les coulisses de nos calculs hypocrites ? SF terrifiante mais pas seulement, portraits à la Bacon, body art, installations et performances appelant au secours ?
Et les ethnologues les avions-nous lus ?
Ne savait-on pas que les peuples sauvages voués à la disparition n'étaient qu'une portion de l'humanité souffrante, écrasée, niée par nos avancées purement technologiques, démonstration de notre inépuisable pouvoir de négation-destruction-domination.
Nous, abonnés à la logique de guerre, aurons peut-être l'espoir, un jour, de voir se lever une génération de réfractaires, de déserteurs des zones de combat. Motivés par l'infini respect de ces "petites différences" qui font le spectre lumineux de notre espèce.
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